dans des idées religieuses. Ma mère disait que le bon Dieu venait chez nous.
Le prêtre s’était incliné sans répondre, voulant faire entendre par là qu’il préférait ne pas causer de ces choses, en de telles circonstances. Cependant, un soir, il traça le tableau du secours inespéré que les âmes souffrantes trouvent dans la religion. Il était question d’une pauvre femme que des revers de toute sorte venaient de conduire au suicide.
— Elle a eu tort de désespérer, dit le prêtre de sa voix profonde. Elle ignorait sans doute les consolations de la prière. J’en ai vu souvent venir à nous, pleurantes, brisées, et elles s’en allaient avec une résignation vainement cherchée ailleurs, une joie de vivre. C’est qu’elles s’étaient agenouillées, qu’elles avaient goûté le bonheur de s’humilier dans un coin perdu de l’église. Elles revenaient, elles oubliaient tout, elles étaient à Dieu.
Marthe avait écouté d’un air rêveur ces paroles, dont les derniers mots s’alanguirent sur un ton de félicité extra-humaine.
— Oui, ce doit être un bonheur, murmura-t-elle comme se parlant à elle-même ; j’y ai songé parfois, mais j’ai toujours eu peur.
L’abbé ne touchait que très rarement à de tels sujets ; au contraire, il parlait souvent charité. Marthe était très-bonne ; les larmes montaient à ses yeux, au récit de la moindre infortune. Lui, paraissait se plaire à la voir ainsi frissonnante de pitié ; il avait chaque soir quelque nouvelle histoire touchante, il la brisait d’une compassion continue qui la faisait s’abandonner. Elle laissait tomber son ouvrage, joignait les mains, la face toute douloureuse, le regardant, pendant qu’il entrait dans des détails navrants sur les gens qui meurent de faim, sur les malheureux que la misère pousse aux méchantes actions. Alors elle lui appartenait,