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Page:Emile Zola - La Curée.djvu/155

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LA CURÉE

ment. C’était le parfum persistant de ce singulier foyer domestique.

Cependant Maxime se prit d’une belle passion pour la petite Sylvia. Il ennuya sa belle-mère pendant plusieurs mois avec cette fille. Renée la connut bientôt d’un bout à l’autre, de la plante des pieds à la pointe des cheveux. Elle avait un signe bleuâtre sur la hanche ; rien n’était plus adorable que ses genoux ; ses épaules avaient cette particularité que la gauche seulement était trouée d’une fossette. Maxime mettait quelque malice à occuper leurs promenades des perfections de sa maîtresse. Un soir, au retour du Bois, les voitures de Renée et de Sylvia, prises dans un embarras, durent s’arrêter côte à côte aux Champs-Élysées. Les deux femmes se regardèrent avec une curiosité aiguë, tandis que Maxime, enchanté de cette situation critique, ricanait en dessous. Quand la calèche se remit à rouler, comme sa belle-mère gardait un silence sombre, il crut qu’elle boudait et s’attendit à une de ces scènes maternelles, une de ces étranges gronderies dont elle occupait encore parfois ses lassitudes.

— Est-ce que tu connais le bijoutier de cette dame ? lui demanda-t-elle brusquement, au moment où ils arrivaient à la place de la Concorde.

— Hélas ! oui, répondit-il avec un sourire ; je lui dois dix mille francs… Pourquoi me demandes-tu cela ?

— Pour rien.

Puis, au bout d’un nouveau silence :

— Elle avait un bien joli bracelet, celui de la main gauche… J’aurais voulu le voir de près.

Ils rentraient. Elle n’en dit pas davantage. Seulement, le lendemain, au moment où Maxime et son père allaient