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LA CURÉE

« bêtise » du boulevard, comme disait Maxime. Elle lui demanda seulement, d’un ton de voix singulier :

— Elle est donc très drôle, cette petite bossue de Louise ?

— Oh ! très drôle… répondit le jeune homme en riant encore. Tu as vu la duchesse de Sternich, avec un oiseau jaune dans les cheveux, n’est-ce pas ?… Est-ce que Louise ne prétend pas que c’est un oiseau mécanique qui bat des ailes et qui crie : Coucou ! coucou ! au pauvre duc toutes les heures.

Renée trouva très comique cette plaisanterie de pensionnaire émancipée. Quand ils furent arrivés, comme Maxime allait prendre congé d’elle, elle lui dit :

— Tu ne montes pas ? Céleste m’a sans doute préparé une collation.

Il monta, avec son abandon ordinaire. En haut, il n’y avait pas de collation, et Céleste était couchée. Il fallut que Renée allumât les bougies d’un petit candélabre à trois branches. Sa main tremblait un peu.

— Cette sotte, disait-elle en parlant de sa femme de chambre, elle aura mal compris mes ordres… Jamais je ne vais pouvoir me déshabiller toute seule.

Elle passa dans son cabinet de toilette. Maxime la suivit, pour lui raconter un nouveau mot de Louise qui lui revenait à la mémoire, tranquille comme s’il se fût attardé chez un ami, cherchant déjà son porte-cigares pour allumer un havane. Mais là, lorsqu’elle eut posé le candélabre, elle se tourna et tomba dans les bras du jeune homme, muette et inquiétante, collant sa bouche sur sa bouche.

L’appartement particulier de Renée était un nid de soie et de dentelle, une merveille de luxe coquet. Un