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LA CURÉE

— Va, je le connais, je le connais beaucoup… Il a dû te dire de bien jolies choses. Conte-moi donc ça.

Ce ton railleur la blessait. Alors elle renchérit encore sur ses éloges, elle trouva son mari tout à fait grand, elle parla de l’affaire de Charonne, de ce tripotage où elle n’avait rien compris, comme d’une catastrophe dans laquelle s’étaient révélées à elle l’intelligence et la bonté de Saccard. Elle ajouta qu’elle signerait l’acte de cession le lendemain, et que, si c’était réellement là un désastre, elle acceptait ce désastre en punition de ses fautes. Maxime la laissait aller, ricanant, la regardant en dessous ; puis il dit à demi-voix :

— C’est ça, c’est bien ça…

Et, plus haut, mettant la main sur l’épaule de Renée :

— Ma chère, je te remercie, mais je savais l’histoire… C’est toi qui es d’une bonne pâte !

Il fit de nouveau mine de s’en aller. Il éprouvait une démangeaison furieuse de tout conter. Elle l’avait exaspéré, avec ses éloges sur son mari, et il oubliait qu’il s’était promis de ne pas parler, pour s’éviter tout désagrément.

— Quoi ! que veux-tu dire ? demanda-t-elle.

— Eh ! pardieu ! que mon père te met dedans de la plus jolie façon du monde… Tu me fais de la peine, vrai ; tu es trop godiche !

Et il lui conta ce qu’il avait entendu chez Laure, lâchement, sournoisement, goûtant une secrète joie à descendre dans ces infamies. Il lui semblait qu’il se vengeait d’une injure vague qu’on venait de lui faire. Son tempérament de fille s’attardait béatement à cette dénonciation, à ce bavardage cruel, surpris derrière une