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Page:Emile Zola - La Joie de vivre.djvu/184

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LES ROUGON-MACQUART.

n’étaient plus seulement les pieds qu’un animal rongeait, c’était tout le corps qui se trouvait broyé, comme sous l’entêtement d’une meule. Et il n’y avait point de soulagement possible, elle ne pouvait que demeurer là, soumise à ses caprices, toujours prête à le changer de position, sans qu’il en retirât jamais une heure de calme. Le pis était que la souffrance le rendait injuste et brutal, il lui parlait furieusement, comme à une servante maladroite.

— Tiens ! tu es aussi bête que Véronique !… S’il est permis de m’entrer tes doigts dans le corps ! Tu as donc des doigts de gendarme ?… Fiche-moi la paix ! je ne veux plus que tu me touches !

Elle, sans répondre, d’une résignation que rien n’entamait, redoublait de douceur. Quand elle le sentait trop irrité, elle se cachait un instant derrière les rideaux, pour qu’il s’apaisât en ne la voyant plus. Souvent, elle y pleurait en silence, non des brutalités du pauvre homme, mais de l’abominable martyre qui le rendait méchant. Et elle l’entendait parler à demi-voix, au milieu de ses plaintes.

— Elle est partie, la sans-cœur… Ah ! je puis bien crever, je n’aurais que la Minouche pour me fermer les yeux. Ce n’est pas Dieu possible qu’on abandonne un chrétien de la sorte… Je parie qu’elle est dans la cuisine à boire du bouillon.

Puis, après avoir lutté un moment, il grognait plus fort, et il se décidait enfin à dire :

— Pauline, es-tu là ?… Viens donc me soulever un peu, il n’y a pas moyen de rester ainsi… Essayons sur le côté gauche, veux-tu ?

Des attendrissements le prenaient, il lui demandait pardon de n’avoir pas été gentil avec elle. Parfois, il voulait qu’elle fît entrer Mathieu, pour être