Page:Emile Zola - La Joie de vivre.djvu/277

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mentir sur des choses que nous savons mieux que toi ? Va conter tes histoires aux passants des routes.

L’enfant ne parut même pas avoir entendu. Elle recommença, avec son aplomb impudent.

— Ayez pitié, ma bonne demoiselle, les hommes sont malades et la mère n’ose plus sortir… Le bon Dieu vous le rendra…

— Tiens ! sauve-toi et ne mens plus, lui dit Pauline, en lui remettant une pièce de monnaie, pour en finir.

Elle ne se fit pas répéter la phrase. D’un bond, elle sortit de la cuisine, et elle traversa la cour, de toute la vitesse de ses courtes jambes. Mais, au même instant, la bonne poussait un cri.

— Ah ! mon Dieu, la timbale qui était sur le buffet !… C’est la timbale de mademoiselle qu’elle emporte !

Aussitôt, elle s’était lancée dehors, à la poursuite de la voleuse. Deux minutes plus tard, elle la ramenait par le bras, d’un air terrible de gendarme. On eut toutes les peines du monde à la fouiller, car elle se débattait, mordait, égratignait, en poussant des hurlements, comme si on l’avait massacrée. La timbale n’était pas dans ses poches, on la trouva dans le haillon qui lui servait de chemise, contre sa peau même. Et, s’arrêtant de pleurer, elle soutint alors effrontément qu’elle ne savait pas, que ça devait être tombé sur elle, pendant qu’elle était assise par terre.

— Monsieur le curé disait bien qu’elle vous volerait, répétait Véronique. C’est moi qui enverrais chercher la police !

Lazare aussi parlait de prison, irrité de l’air provocant de la petite, qui se redressait comme une