Page:Emile Zola - La Joie de vivre.djvu/378

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Lazare, qui était monté derrière Pauline et qui écoutait à la porte, osa entrer en disant qu’il serait prudent aussi de courir à Arromanches, pour ramener le docteur Cazenove, dans le cas où des complications se présenteraient. Mais Louise se mit à pleurer. Ils n’avaient donc pas la moindre pitié de son état ? Pourquoi la martyriser de la sorte ? On le savait bien, toujours l’idée qu’un homme l’accoucherait l’avait révoltée. C’était en elle une pudeur maladive de femme coquette, un malaise de se montrer dans l’abandon affreux de la souffrance, qui, même devant son mari et sa cousine, lui faisait serrer le peignoir autour de ses pauvres reins tordus.

— Si tu vas chercher le docteur, bégayait-elle, je me couche, je me tourne contre le mur, et je ne réponds plus à personne.

— Ramène toujours la sage-femme, dit Pauline à Lazare. Je ne puis croire non plus que le moment soit arrivé. Il s’agit de la calmer seulement.

Tous deux redescendirent. L’abbé Horteur venait d’entrer souhaiter un petit bonsoir, et il restait muet devant Chanteau effaré. On voulut que Lazare mangeât au moins un morceau de veau, avant de se mettre en route ; mais, la tête perdue, il déclara qu’une seule bouchée l’étranglerait, il partit en courant pour Verchemont.

— Elle m’a appelée, je crois ? reprit Pauline, qui s’élança vers l’escalier. Si j’avais besoin de Véronique, je taperais… Achève de dîner sans moi, n’est-ce pas ? mon oncle.

Le prêtre, gêné d’être tombé au milieu d’un accouchement, ne trouvait pas ses paroles habituelles de consolation. Il finit par se retirer, après avoir