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LES ROUGON-MACQUART.

et boudeuse, l’ennuyait maintenant. Elle lui parla la première, elle voulut en finir par une nouvelle imprévue.

— Tu ne sais pas ? Jean veut que je l’épouse, il me demande.

Françoise, qui mangeait debout, devant la fenêtre, resta indifférente, ne se tourna même pas.

— Qu’est-ce que ça me fiche ?

— Ça te fiche, que tu l’aurais pour beau-frère, et que je désire savoir s’il te plairait.

Elle haussa les épaules.

— Me plaire, à quoi bon ? lui ou Buteau, du moment que je ne couche pas avec !… Seulement, voulez-vous que je vous dise ? tout ça n’est guère propre.

Et elle sortit achever son pain dans la cour.

Jean, pris de malaise, affecta de rire, comme à la boutade d’une enfant gâtée ; tandis que la Frimat déclarait que, dans sa jeunesse, on aurait fouetté une galopine comme ça, jusqu’au sang. Quant à Lise, sérieuse, elle demeura un instant muette, de nouveau toute à sa lessive. Puis, elle conclut.

— Eh bien ! nous en restons là, Caporal… Je ne vous dis pas non, je ne vous dis pas oui… Voici les foins, je verrai notre monde, je questionnerai, je saurai à quoi m’en tenir. Et nous déciderons quelque chose… Ça va-t-il ?

— Ça va !

Il tendit la main, il secoua la sienne, qu’elle lui tendait. De toute sa personne, trempée de buée chaude, s’exhalait une odeur de bonne ménagère, une odeur de cendre parfumée d’iris.