C’était, en effet, une lettre de Maxime. Félicité, heureuse de l’avoir reçue, en usait comme d’un moyen actif, après avoir attendu vainement que la misère lui livrât son fils. Puisque ni Pascal ni Clotilde ne venaient lui demander aide et secours, elle changeait de plan une fois encore, elle reprenait son ancienne idée de les séparer ; et, cette fois, l’occasion lui semblait décisive. La lettre de Maxime était pressante, il l’adressait à sa grand’mère, pour que celle-ci plaidât sa cause près de sa sœur. L’ataxie s’était déclarée, il ne marchait plus déjà qu’au bras d’un domestique. Mais, surtout, il déplorait une faute qu’il avait commise, une jolie fille brune qui s’était introduite chez lui, dont il n’avait pas su s’abstenir, au point de laisser entre ses bras le reste de ses moelles ; et le pis était qu’il avait maintenant la certitude que cette mangeuse d’hommes était un cadeau discret de son père. Saccard la lui avait envoyée, galamment, pour hâter l’héritage. Aussi, après l’avoir jetée dehors, Maxime s’était-il barricadé dans son hôtel, consignant son père lui-même à la porte, tremblant de le voir, un matin, rentrer par les fenêtres. La solitude l’épouvantait, et il réclamait désespérément sa sœur, il la voulait comme un rempart contre les abominables entreprises, comme une femme enfin douce et droite, qui le soignerait. La lettre donnait à entendre que, si elle se conduisait bien avec lui, elle n’aurait pas à se repentir ; et il terminait, en rappelant à la jeune fille la promesse qu’elle lui avait faite, lors de son voyage à Plassans, de le rejoindre, s’il avait réellement besoin d’elle, un jour.
Pascal resta glacé. Il relut les quatre pages. C’était la séparation qui s’offrait, acceptable pour lui, heureuse pour Clotilde, si aisée et si naturelle, qu’on devait consentir tout de suite ; et, malgré l’effort de sa raison, il se sentait si peu ferme, si peu résolu encore, qu’il dut s’asseoir un