Page:Emile Zola - Le Docteur Pascal.djvu/346

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— Non, père Durieu, ce serait trop long. Je vais à pied.

À grands pas, elle monta la rampe. Son cœur se serrait tellement, qu’elle étouffait. Le soleil avait disparu derrière les coteaux de Sainte-Marthe, une cendre fine tombait du ciel gris, avec le premier frisson de novembre ; et, comme elle prenait le chemin des Fenouillères, elle eut une nouvelle apparition de la Souleiade qui la glaça, la façade morne sous le crépuscule, tous les volets fermés, dans une tristesse d’abandon et de deuil.

Mais le coup terrible que reçut Clotilde, ce fut lorsqu’elle reconnut Ramond, debout au seuil du vestibule, et qui semblait l’attendre. Il l’avait guettée en effet, il était descendu, voulant amortir en elle l’affreuse catastrophe. Elle arrivait essoufflée, elle avait passé par le quinconce des platanes, près de la source, pour couper au plus court ; et, de voir le jeune homme là, au lieu de Pascal qu’elle espérait encore y trouver, elle eut une sensation d’écroulement, d’irréparable malheur. Ramond était très pâle, bouleversé, malgré son effort de courage. Il ne prononça pas un mot, attendant d’être questionné. Elle-même suffoquait, ne disait rien. Et ils entrèrent ainsi, il la mena jusqu’à la salle à manger, où ils restèrent de nouveau quelques secondes en face l’un de l’autre, muets, dans cette angoisse.

— Il est malade, n’est-ce pas ? balbutia-t-elle enfin.

Il répéta simplement :

— Oui, malade.

— J’ai bien compris en vous voyant, reprit-elle. Pour qu’il ne soit pas là, il faut qu’il soit malade.

Alors, elle insista.

— Il est malade, très malade, n’est-ce pas ?

Il ne répondait plus, il pâlissait davantage, et elle le regarda. À ce moment, elle vit la mort sur lui, sur ses