Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/113

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Certains jours, j’ai assez du bleu, du rouge, de toutes les couleurs ; tandis que le blanc est une joie complète dont jamais je ne me lasse. Rien n’y blesse, on voudrait s’y perdre… Nous avions un chat blanc, avec des taches jaunes, et je lui avais peint ses taches. Il était très bien, mais ça n’a pas tenu… Tenez ! ce que mère ne sait pas, je garde tous les déchets de soie blanche, j’en ai plein un tiroir, pour rien, pour le plaisir de les regarder et de les toucher, de temps en temps… Et j’ai un autre secret, oh ! un gros celui-là ! Quand je m’éveille, chaque matin, il y a près de mon lit, quelqu’un, oui ! une blancheur qui s’envole !

Il n’eut pas un doute, il parut fermement la croire. Cela n’était-il pas simple et dans l’ordre ? Une jeune princesse ne l’aurait point conquis si vite, parmi les magnificences de sa cour. Elle avait, au milieu de tout ce linge blanc, sur cette herbe verte, un grand air charmant, joyeux et souverain, qui le prenait au cœur, d’une étreinte grandissante. C’en était fait, il n’y avait plus qu’elle, il la suivrait jusqu’au bout de la vie. Elle continuait à marcher, de son petit pas rapide, en tournant parfois la tête, avec un sourire ; et il venait derrière toujours, suffoqué de ce bonheur, sans aucun espoir de l’atteindre jamais.

Mais une bourrasque souffla, un vol de menus linges, des cols et des manchettes de percale, des fichus et des guimpes de batiste, fut soulevé