Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/180

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au premier rang, mince et blond, en habit, avec ses cheveux bouclés, son nez droit, un peu fort, ses yeux noirs, d’une douceur hautaine. Elle l’attendait, elle n’était pas surprise de le voir enfin se changer en prince. Au regard anxieux qu’il lui jeta, implorant le pardon de son mensonge, elle répondit par un clair sourire.

— Tiens ! murmura Hubertine stupéfaite, n’est-ce point ce jeune homme ?

Elle aussi l’avait reconnu, et elle s’inquiéta, lorsque, se tournant, elle vit sa fille transfigurée.

— Il nous a donc menti ?… Pourquoi ? le sais-tu ?… Sais-tu qui est ce jeune homme ?

Oui, peut-être le savait-elle. Une voix répondait en elle à des questions récentes. Mais elle n’osait, elle ne voulait plus s’interroger. La certitude se ferait, lorsqu’il en serait temps. Elle en sentait l’approche, dans un gonflement d’orgueil et de passion.

— Qu’y a-t-il donc ? demanda Hubert, en se penchant derrière sa femme.

Jamais il n’était à la minute présente. Et, quand elle lui eut désigné le jeune homme, il douta.

— Quelle idée ! ce n’est pas lui.

Alors, Hubertine affecta de s’être trompée. C’était le plus sage, elle se renseignerait. Mais la procession qui venait de s’arrêter de nouveau, pendant que Monseigneur, à l’angle de la rue, encensait le Saint Sacrement, parmi les verdures du reposoir,