Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/229

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personne ne le voyait couler : il n’en était que plus pâle et plus muet.

Alors, ce grand silence obstiné désespéra Angélique, qui redoubla de supplications.

– Je me remets entre vos mains, Monseigneur. Ayez pitié, décidez de mon sort.

Et il ne parlait toujours pas, il la terrifiait, comme s’il avait grandi devant elle, d’une redoutable majesté. La cathédrale déserte, avec ses bas-côtés déjà sombres, ses voûtes hautes où se mourait le jour, élargissait encore l’angoisse de l’attente. Dans la chapelle, on ne distinguait même plus les pierres tombales, il ne restait que lui, avec sa soutane noire, sa longue face blanche, qui semblait seule avoir gardé de la lumière. Elle en voyait les yeux luire, s’attacher sur elle avec un éclat croissant. Était-ce donc de la colère qui les allumait de la sorte ?

— Monseigneur, si je n’étais pas venue, je me serais éternellement reproché d’avoir fait notre malheur à tous deux, par manque de courage… Dites, je vous en supplie, dites que j’ai eu raison, que vous consentez.

À quoi bon discuter avec cette enfant ? Il avait donné à son fils les raisons de son refus, cela suffisait. S’il ne parlait pas, c’était qu’il croyait n’avoir rien à dire. Elle le comprit sans doute, elle voulut se hausser jusqu’à ses mains, pour les baiser. Mais il les écarta violemment en arrière ; et elle