Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/250

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avec douceur, il descendit, en entendant sa femme rentrer.

En bas, dans l’atelier, l’explication eut lieu. Hubertine venait d’ôter son chapeau, et tout de suite il lui dit qu’il avait ramassé l’enfant là, qu’elle sommeillait sur son lit, frappée à mort.

— Nous nous sommes trompés. Elle songe toujours à ce garçon, et elle en meurt… Ah ! si tu savais le coup que j’ai reçu, le remords qui me déchire, depuis que j’ai compris et que je l’ai portée là-haut, si pitoyable ! C’est notre faute, nous les avons séparés par des mensonges… Quoi ? tu la laisserais souffrir, tu ne dirais rien pour la sauver !

Hubertine, comme Angélique, se taisait, le regardait de son grand air raisonnable, toute pâle de chagrin. Et lui, le passionné que cette passion souffrante jetait hors de son habituelle soumission, ne se calmait pas, agitait ses mains fiévreuses.

— Eh bien ! je parlerai, moi, je lui dirai que Félicien l’aime, que c’est nous autres qui avons eu la cruauté de l’empêcher de revenir, en le trompant lui aussi… Chacune de ses larmes, maintenant, va me brûler le cœur. Ce serait un meurtre dont je me sentirais complice… Je veux qu’elle soit heureuse, oui ! heureuse, quand même, par tous les moyens…

Il s’était approché de sa femme, il osait crier sa tendresse révoltée, s’irritant davantage du silence triste qu’elle gardait.