Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/281

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s’aperçut qu’elle n’était point morte, à son petit souffle, lui mit aux lèvres le crucifix. Il attendait, sa face gardait la majesté du ministre de la pénitence, aucune émotion humaine ne s’y montra, lorsqu’il eut constaté que pas un frémissement n’avait couru sur le fin profil ni dans les cheveux de lumière. Elle vivait pourtant, cela suffisait au rachat des fautes.

Alors, Monseigneur reçut de l’abbé le bénitier et l’aspersoir ; et, tandis que celui-ci lui présentait le rituel ouvert, il jeta de l’eau bénite sur la mourante, en lisant les paroles latines :

Asperges me, Domine, hyssopo, et mundabor ; lavabis me, et super nivem, dealbabor.

Des gouttes jaillissaient, tout le grand lit en était rafraîchi, comme d’une rosée. Il en plut sur les doigts, sur les joues ; mais, une à une, elles y roulaient, ainsi que sur un marbre insensible. Et l’évêque se tourna ensuite vers les assistants, il les aspergea à leur tour. Hubert et Hubertine, agenouillés côte à côte, dans leur besoin de foi ardente, se courbèrent sous l’ondée de cette bénédiction. Et l’évêque bénissait aussi la chambre, les meubles, les murs blancs, toute cette blancheur nue, lorsque, en passant près de la porte, il se trouva devant son fils, abattu sur le seuil, sanglotant dans ses mains brûlantes. D’un geste lent, il leva par trois fois l’aspersoir, il le purifia d’une pluie douce. Cette eau bénite, ainsi répandue par-