Page:Emile Zola - Le Rêve.djvu/74

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et tout le disait en elle, sa bouche que l’extase entrouvrait, ses yeux où se reflétait l’infini bleu de sa vision. Maintenant, ce rêve de fille pauvre, elle le brodait de son fil d’or ; c’était de lui que naissaient, sur le satin blanc, et les grands lis, et les roses, et le chiffre de Marie. La tige du lis, en couchure chevronnée, avait l’élancement d’un jet de lumière, tandis que les feuilles longues et minces, faites de paillettes cousues chacune avec un brin de cannetille, retombaient en une pluie d’étoiles. Au centre, le chiffre de Marie était l’éblouissement, d’un relief d’or massif, ouvragé de guipure et de gaufrure, brûlant comme une gloire de tabernacle, dans l’incendie mystique de ses rayons. Et les roses de soies tendres vivaient, et la chasuble entière resplendissait, toute blanche, miraculeusement fleurie d’or.

Au bout d’un long silence, Angélique leva la tête. Elle regarda Hubertine d’un air de malice, elle hocha le menton, en répétant :

— Je l’attends, et il viendra.

C’était fou, cette imagination. Mais elle s’entêtait. Cela se passerait ainsi, elle en était sûre. Rien n’ébranlait sa conviction souriante.

— Quand je te dis, mère, que ces choses arriveront.

Hubertine prit le parti de plaisanter. Et elle la taquina.

— Mais je croyais que tu ne voulais pas te