Page:Emile Zola - Le Ventre de Paris.djvu/342

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
342
LES ROUGON-MACQUART.

elles perdaient patience. Il y avait plus d’une heure qu’elles attendaient sur le trottoir. Elles disaient que, pendant ce temps, on les volait peut-être, à leurs bancs. Alors, mademoiselle Saget les retenait avec une nouvelle histoire. Florent ne pouvait pas s’être sauvé ; il allait revenir ; ce serait très-intéressant, de le voir arrêter. Et elle donnait des détails minutieux sur la souricière, tandis que la marchande de beurre et la marchande de fruits continuaient à examiner la maison de haut en bas, épiant chaque ouverture, s’attendant à voir des chapeaux de sergents de ville à toutes les fentes. La maison, calme et muette, baignait béatement dans le soleil du matin.

— Si l’on dirait que c’est plein de police ! murmura madame Lecœur.

– Ils sont dans la mansarde, là-haut, dit la vieille. Voyez-vous, ils ont laissé la fenêtre comme ils l’ont trouvée… Ah ! regardez, il y en a un, je crois, caché derrière le grenadier, sur la terrasse.

Elles tendirent le cou, elles ne virent rien.

— Non, c’est l’ombre, expliqua la Sarriette. Les petits rideaux eux-mêmes ne remuent pas. Ils ont dû s’asseoir tous dans la chambre et ne plus bouger.

À ce moment, elles aperçurent Gavard qui sortait du pavillon de la marée, l’air préoccupé. Elles se regardèrent avec des yeux luisants, sans parler. Elles s’étaient rapprochées, droites dans leurs jupes tombantes. Le marchand de volailles vint à elles.

— Est-ce que vous avez vu passer Florent ? demanda-t-il.

Elles ne répondirent pas.

— J’ai besoin de lui parler tout de suite, continua Gavard. Il n’est pas à la poissonnerie. Il doit être remonté chez lui… Vous l’auriez vu, pourtant.

Les trois femmes étaient un peu pâles. Elles se regardaient toujours, d’un air profond, avec de légers tressaille-