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LES ROUGON-MACQUART

devait être tout bénéfice pour un homme. Des plans compliqués l’absorbaient déjà, lorsqu’un vacarme le tira de sa rêverie.

— Ouf ! c’est fini ! dit Trublot.

On complimentait Clotilde. Madame Josserand, qui s’était précipitée, lui serrait les deux mains ; tandis que les hommes, soulagés, reprenaient leur conversation, et que les dames, d’une main plus vive, s’éventaient. Duveyrier osa se risquer alors à retourner dans le petit salon, où Trublot et Octave le suivirent. Au milieu des jupes, le premier se pencha à l’oreille du second.

— Regardez à votre droite… Voilà le raccrochage qui commence.

C’était madame Josserand qui lançait Berthe sur Auguste. Il avait eu l’imprudence de venir saluer ces dames. Ce soir-là, sa tête le laissait assez tranquille ; il sentait un seul point névralgique, dans l’œil gauche ; mais il redoutait la fin de la soirée, car on allait chanter, et rien ne lui était plus mauvais.

— Berthe, dit la mère, indique donc à monsieur le remède que tu as copié pour lui, dans un livre… Oh ! c’est souverain contre les migraines !

Et, la partie étant engagée, elle les laissa debout, près d’une fenêtre.

— Diable ! s’ils en sont à la pharmacie ! murmura Trublot.

Dans le petit salon, M. Josserand, désireux de satisfaire sa femme, était resté devant M. Vabre, très embarrassé, car le vieillard dormait, et il n’osait le réveiller pour se montrer aimable. Mais, quand la musique cessa, M. Vabre ouvrit les paupières. Petit et gros, complètement chauve, avec deux touffes de cheveux blancs sur les oreilles, il avait une face rougeaude, à la bouche lippue, aux yeux ronds et à fleur de tête. M. Josserand s’étant informé poliment de sa santé, la