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Page:Emile Zola - Pot-Bouille.djvu/149

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POT-BOUILLE

— Rappelez-vous, c’est jeudi prochain que je vous mène chez la maîtresse à Duveyrier… Nous dînerons ensemble.

La maison retombait à son recueillement, à ce silence religieux qui semblait sortir des chastes alcôves. Octave avait rejoint Marie dans la chambre, au bord du lit conjugal, dont elle apprêtait les oreillers. En haut, la chaise se trouvant encombrée de la cuvette et d’une vieille paire de savates, Trublot s’était assis sur l’étroite couchette d’Adèle ; et, en habit, cravaté de blanc, il attendait. Lorsqu’il reconnut le pas de Julie qui montait se coucher, il retint son souffle, ayant la continuelle terreur des querelles de femmes. Enfin, Adèle parut. Elle était fâchée, elle l’empoigna.

— Dis donc, toi ! tu pourrais bien ne pas me marcher dessus, quand je sers à table !

— Comment, te marcher dessus ?

— Bien sûr, tu ne me regardes seulement pas, tu ne dirais jamais s’il vous plaît, en demandant du pain… Ainsi, ce soir, lorsque j’ai passé le veau, tu as eu l’air de me renier… J’en ai assez, vois-tu ! Toute la maison m’agonit de sottises. C’est trop à la fin, si tu te mets avec les autres !

Elle se déshabillait rageusement ; puis, se jetant sur le vieux sommier qui craquait, elle tourna le dos. Il dut s’humilier.

Et, pendant ce temps, dans la chambre voisine, l’ouvrier qui gardait sa pointe de vin, parlait seul, d’une voix si haute, que le corridor entier l’entendait.

— Hein ? c’est drôle tout de même, qu’on vous empêche de coucher avec votre femme !… Pas de femmes dans ta maison, bougre de ramolli ! Va donc en ce moment mettre un peu le nez sous les draps, pour voir !