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Page:Emile Zola - Pot-Bouille.djvu/188

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LES ROUGON-MACQUART

Le prêtre allait faire le signe de la croix sur la main gauche de Berthe. Les yeux ailleurs, il se trompa, le fit sur la main droite.

In nomine Patris, et Filii, et Spiritus Sancti.

Amen, répondit l’enfant de chœur, qui lui aussi se haussait pour voir.

Enfin, le scandale était évité. Duveyrier avait prouvé à Théophile ahuri que la lettre ne pouvait être de M. Mouret. Ce fut presque une déception pour l’assistance. Il y eut des soupirs, des mots vifs échangés. Et quand le monde, encore tumultueux, se retourna vers l’autel, Berthe et Auguste se trouvaient mariés, elle sans paraître y avoir pris garde, lui n’ayant pas perdu une parole du prêtre, tout à cette affaire, dérangé seulement par sa migraine qui lui fermait l’œil gauche.

— Ces chers enfants ! dit M. Josserand, absorbé, la voix tremblante, à M. Vabre qui, depuis le commencement de la cérémonie, s’occupait à compter les cierges allumés, se trompant toujours, et reprenant son calcul.

Mais les orgues, de nouveau, ronflaient dans la nef, l’abbé Mauduit avait reparu en chasuble, les chantres attaquaient la messe. C’était une messe en musique, d’une grande pompe. L’oncle Bachelard, qui faisait le tour des chapelles, lisait les inscriptions latines des tombeaux, sans les comprendre ; celle du duc de Créquy l’intéressa particulièrement. Trublot et Gueulin avaient rejoint Octave, pour avoir des détails ; et tous trois, derrière la chaire, ricanaient. Des chants s’enflaient brusquement comme des vents d’orage, des enfants de chœur balançaient des encensoirs ; puis, il y avait des coups de sonnette, des silences où l’on entendait les balbutiements du prêtre à l’autel. Et Théophile ne pouvait tenir en place ; il gardait Duveyrier, qu’il accablait de ses réflexions affolées, ayant perdu pied, ne comprenant pas comment le monsieur du rendez-