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POT-BOUILLE

quartier, car il ne s’agissait plus d’un propriétaire. Le mort était un homme tranquille, qui ne troubla même pas le sommeil de madame Juzeur. Marie, sur le point d’accoucher depuis la veille, exprima le seul regret de n’avoir pu aider ces dames à faire la toilette du pauvre monsieur. En bas, madame Gourd se contenta de se lever, au passage du cercueil, et de le saluer du fond de la loge, sans venir jusqu’à la porte. Toute la maison, cependant, alla au cimetière : Duveyrier, Campardon, les Vabre, M. Gourd. On causa du printemps, dont les grandes pluies avaient compromis les récoltes. Campardon s’étonna de la mauvaise mine de Duveyrier ; et, comme, en regardant descendre le corps, le conseiller pâlissait, sur le point de se trouver mal, l’architecte murmura :

— Il a senti l’odeur de la terre… Dieu veuille que la maison ne soit pas décimée davantage !

Il fallut soutenir jusqu’à leur voiture madame Josserand et ses filles. Léon s’empressait, aidé de l’oncle Bachelard, pendant que, l’air gêné, Auguste marchait en arrière. Ce dernier monta dans une autre voiture, avec Duveyrier et Théophile. Clotilde gardait l’abbé Mauduit, qui n’avait pas officié, mais qui était venu au cimetière, voulant donner un témoignage de sympathie à la famille. Les chevaux repartirent plus gaiement ; et, tout de suite, elle pria le prêtre de rentrer avec eux, car elle sentait l’heure favorable. Il consentit.

Rue de Choiseul, les trois voitures de deuil déposèrent silencieusement la famille. Théophile rejoignit aussitôt Valérie, restée à surveiller un grand nettoyage, pour profiter de la fermeture du magasin.

— Tu peux faire tes paquets, lui cria-t-il d’une voix furieuse. Ils sont tous à le pousser. Je parie qu’il va lui demander pardon !

Tous, en effet, éprouvaient le pressant besoin d’en