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LES ROUGON-MACQUART

— Vous savez qu’elle ne va pas bien du tout ! murmura-t-il pendant qu’Hippolyte introduisait madame Juzeur.

— Qui donc ? demanda Octave.

— Mais Adèle, la bonne d’en haut.

En apprenant son indisposition, il était monté paternellement pour la voir, au sortir de table. Ça devait être une forte cholérine ; elle aurait eu besoin d’un bon verre de vin chaud, et elle n’avait pas même du sucre. Puis, comme il s’aperçut que son ami souriait, l’air indifférent :

— Tiens ! c’est vrai, vous êtes marié, farceur ! Ça ne vous intéresse plus… Moi qui oubliais, en vous trouvant dans les coins, avec madame Tout ce que vous voudrez, mais pas ça !

Ils entrèrent ensemble. Justement, ces dames causaient de leurs domestiques, et elles se passionnaient, au point qu’elles ne les virent pas d’abord. Toutes, d’un air de complaisance, approuvaient madame Duveyrier qui expliquait, embarrassée, pourquoi elle gardait Clémence et Hippolyte : lui, était brutal, mais elle, habillait si bien, qu’on fermait volontiers les yeux sur le reste. Valérie et Berthe ne pouvaient décidément trouver une fille convenable ; elles y renonçaient, elles épuisaient les bureaux de placement, dont le personnel gâté traversait leurs cuisines au galop. Madame Josserand tombait avec violence sur Adèle, dont elle racontait de nouveaux traits de saleté et de bêtise, extraordinaires ; et elle ne la renvoyait pas. Quant à l’autre madame Campardon, elle comblait Lisa d’éloges : une perle, aucun reproche à lui faire, enfin une de ces bonnes méritantes auxquelles on donne des prix.

— Maintenant, elle est de la famille, dit-elle. Notre petite Angèle suit des cours à l’Hôtel de Ville, et c’est Lisa qui l’accompagne… Oh ! elles pourraient bien