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LES ROUGON-MACQUART

— Ce sont les Vabre, murmura Trublot, en se penchant vers son nouvel ami. Auguste, le grand, celui qui a une figure de mouton malade, est le fils aîné du propriétaire : trente-trois ans, toujours des maux de tête qui lui tirent les yeux et qui l’ont empêché autrefois de continuer le latin ; un garçon maussade, tombé dans le commerce… L’autre, Théophile, cet avorton aux cheveux jaunes, à la barbe clairsemée, ce petit vieux de vingt-huit ans, secoué par des quintes de toux et de rage, a tâté d’une douzaine de métiers, puis a épousé la jeune femme qui marche la première, madame Valérie…

— Je l’ai déjà vue, interrompit Octave. C’est la fille d’un mercier du quartier, n’est-ce pas ? Mais, comme ça trompe, ces voilettes ! elle m’avait paru jolie… Elle n’est que singulière, avec sa face crispée et son teint de plomb.

— Encore une qui n’est pas mon rêve, reprit sentencieusement Trublot. Elle a des yeux superbes, il y a des hommes à qui ça suffit… Hein ! c’est maigre !

Madame Josserand s’était levée pour serrer les mains de Valérie.

— Comment ! cria-t-elle, monsieur Vabre n’est pas avec vous ? et ni monsieur ni madame Duveyrier ne nous ont fait l’honneur de venir ? Ils nous avaient promis pourtant. Ah ! voilà qui est très mal !

La jeune femme excusa son beau-père, que son âge retenait chez lui, et qui, d’ailleurs, préférait travailler le soir. Quant à son beau-frère et à sa belle-sœur, ils l’avaient chargée de présenter leurs excuses, ayant reçu une invitation à une soirée officielle, où ils ne pouvaient se dispenser d’aller. Madame Josserand pinça les lèvres. Elle, ne manquait pas un des samedis de ces poseurs du premier, qui se seraient crus déshonorés, s’ils étaient, un mardi, montés au quatrième. Sans