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Page:Emile Zola - Son Excellence Eugène Rougon.djvu/154

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VI


L’été arriva. Rougon vivait dans un calme absolu. Madame Rougon, en trois mois, avait rendu grave la maison de la rue Marbeuf, où traînait autrefois une odeur d’aventure. Maintenant, les pièces, un peu froides, très-propres, sentaient la vie honnête ; les meubles méthodiquement rangés, les rideaux ne laissant pénétrer qu’un filet de jour, les tapis étouffant les bruits, mettaient là l’austérité presque religieuse d’un salon de couvent ; même il semblait que ces choses étaient anciennes, qu’on entrait dans un antique logis tout plein d’un parfum patriarcal. Cette grande femme laide, qui exerçait une surveillance continue, ajoutait à ce recueillement la douceur de son pas silencieux ; et elle menait le ménage d’une main si discrète et si aisée, qu’elle paraissait avoir vieilli en cet endroit, dans vingt années de mariage.

Rougon souriait, quand on le complimentait. Il s’entêtait à dire qu’il s’était marié sur le conseil et sur le choix de ses amis. Sa femme le ravissait. Depuis longtemps, il avait l’envie d’un intérieur bourgeois, qui fût comme une preuve matérielle de sa probité. Cela achevait de le tirer de son passé suspect, de le classer parmi les honnêtes gens. Il était resté très-provincial, il avait gardé comme idéal certains salons cossus de Plassans,