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Page:Emile Zola - Son Excellence Eugène Rougon.djvu/220

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LES ROUGON-MACQUART.

Depuis que la jeune femme racontait son accident, madame de Llorentz appuyait violemment deux doigts de sa main contre ses lèvres. Aux derniers détails, elle ferma les yeux, comme prise d’un vertige de colère. Elle resta là encore une minute ; puis, ne se contenant plus, elle sortit. M. de Plouguern, très-intrigué, se glissa derrière elle. Clorinde, qui la guettait, eut un geste involontaire de victoire.

La conversation changea. M. Beulin-d’Orchère parlait d’un procès scandaleux dont l’opinion se préoccupait beaucoup ; il s’agissait d’une demande en séparation, fondée sur l’impuissance du mari ; et il rapportait certains faits avec des phrases si décentes de magistrat, que madame de Combelot, ne comprenant pas, demandait des explications. Le chevalier Rusconi plut énormément en chantant à demi-voix des chansons populaires du Piémont, des vers d’amour, dont il donnait ensuite la traduction française. Au milieu d’une de ces chansons, Delestang entra ; il revenait de la forêt, où il battait les routes depuis deux heures, à la recherche de sa femme ; on sourit de l’étrange figure qu’il avait. Cependant, l’impératrice semblait prise tout d’un coup d’une vive amitié pour Clorinde. Elle l’avait fait asseoir à son côté, elle causait chevaux avec elle. Pyrame, le cheval monté par la jeune femme pendant la chasse, était d’un galop très-dur ; et elle disait que, le lendemain, elle lui ferait donner César.

Rougon, dès l’arrivée de Clorinde, s’était approché d’une fenêtre, en affectant d’être très-intéressé par des lumières qui s’allumaient au loin, à gauche du parc. Personne ainsi ne put voir les légers tressaillements de sa face. Il demeura longtemps debout, devant la nuit. Enfin il se retournait, l’air impassible, lorsque M. de Plouguern, qui rentrait, s’approcha de lui, souffla à