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Page:Emile Zola - Son Excellence Eugène Rougon.djvu/273

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SON EXCELLENCE EUGÈNE ROUGON.

pièces à la signature du ministre. C’était un va-et-vient continu, la machine administrative en travail, avec une dépense extraordinaire de papiers promenés de bureau en bureau. Et, au milieu de cette agitation, derrière la porte, dans l’antichambre, on entendait le gros silence résigné des vingt et quelques personnes qui s’assoupissaient sous les regards de Merle, en attendant que Son Excellence voulût bien les recevoir. Rougon, comme pris d’une fièvre d’activité, se débattait parmi tout ce monde, donnait des ordres à demi-voix dans un coin de son cabinet, éclatait brusquement en paroles violentes contre quelque chef de service, taillait la besogne, tranchait les affaires d’un mot, énorme, insolent, le cou gonflé, la face crevant de force.

Merle entra, avec sa tranquille dignité que les rebuffades ne pouvaient entamer.

— Monsieur le préfet de la Somme… commença-t-il.

— Encore ! interrompit furieusement Rougon.

L’huissier s’inclina, attendit de pouvoir parler.

— Monsieur le préfet de la Somme m’a prié de demander à Son Excellence si elle le recevrait ce matin. Dans le cas contraire, Son Excellence serait bien bonne de lui fixer une heure pour demain.

— Je le recevrai ce matin… Qu’il ait un peu de patience, que diable !

La porte du cabinet était restée ouverte, et l’on apercevait l’antichambre, par l’entre-bâillement, une vaste pièce, avec une grande table au milieu, et un cordon de fauteuils de velours rouge, le long des murs. Tous les fauteuils étaient occupés ; même deux dames se tenaient debout, devant la table. Les têtes se tournaient discrètement, des regards se glissaient dans le cabinet du ministre, suppliants, tout allumés du désir d’entrer. Près de la porte, le préfet de la Somme, un petit homme