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UNE PAGE D’AMOUR.

dans une stalle du chœur. Mais il fallut soulever Jeanne.

— Ah ! je le vois… Il nous regarde, il fait des petits yeux.

L’abbé « faisait des petits yeux, » selon Jeanne, quand il riait en dedans. Hélène alors échangea avec lui un signe de tête amical. Ce fut pour elle comme une certitude de paix, une cause dernière de sérénité qui lui rendait l’église chère et l’endormait dans une félicité pleine de tolérance. Des encensoirs se balançaient devant l’autel, de légères fumées montaient ; et il y eut une bénédiction, un ostensoir pareil à un soleil, levé lentement et promené au-dessus des fronts abattus par terre. Hélène restait prosternée, dans un engourdissement heureux, lorsqu’elle entendit madame Deberle qui disait :

— C’est fini, allons-nous-en.

Un remuement de chaises, un piétinement roulaient sous la voûte. Pauline avait pris la main de Jeanne. Tout en marchant la première avec l’enfant, elle la questionnait.

— Tu n’es jamais allée au théâtre ?

— Non. Est-ce que c’est plus beau ?

La petite, le cœur gonflé de gros soupirs, avait un hochement de menton, comme pour déclarer que rien ne pouvait être plus beau. Mais Pauline ne répondit pas ; elle venait de se planter devant un prêtre, qui passait en surplis ; et, lorsqu’il fut à quelques pas :

— Oh ! la belle tête ! dit-elle tout haut, avec une conviction qui fit retourner deux dévotes.

Cependant, Hélène s’était relevée. Elle piétinait à côté de Juliette, au milieu de la foule qui s’écoulait difficilement. Trempée de tendresse, comme lasse et