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UNE PAGE D’AMOUR.

Alors, sans attendre la bonne, il redescendit. Chaque jour, il montait, recevait la même réponse et s’en allait.

Ce qui brisait Hélène, c’étaient les visites. Les quelques dames dont elle avait fait la connaissance chez les Deberle, croyaient devoir lui apporter des consolations. Madame de Chermette, madame Levasseur, madame de Guiraud, d’autres encore, se présentèrent ; et elles ne demandaient pas à entrer, mais elles questionnaient Rosalie si haut, que le bruit de leurs voix traversait les minces cloisons du petit appartement. Alors, prise d’impatience, Hélène les recevait dans la salle à manger, debout, la parole brève. Elle restait toute la journée en peignoir, oubliant de changer de linge, ses beaux cheveux simplement tordus et relevés. Ses yeux se fermaient de lassitude dans son visage rougi, sa bouche amère et empâtée ne trouvait plus les mots. Quand Juliette montait, elle ne pouvait lui fermer la chambre, elle la laissait s’installer un instant près du lit.

— Ma chère, lui dit un jour amicalement celle-ci, vous vous abandonnez trop. Ayez un peu de courage.

Et Hélène devait répondre, lorsque Juliette cherchait à la distraire, en parlant des événements qui occupaient Paris.

— Vous savez que décidément nous allons avoir la guerre… Je suis très-ennuyée, j’ai deux cousins qui partiront.

Elle montait ainsi au retour de ses courses à travers Paris, animée par toute une après-midi de bavardage, apportant le tourbillon de ses longues jupes dans cette chambre recueillie de malade ; et elle avait beau baisser la voix, prendre des mines apitoyées, sa jolie indifférence perçait, on la voyait heureuse et