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LES ROUGON-MACQUART.

gues épingles, à la tunique de pourpre brodée d’oiseaux, s’en allait en robe blanche.

— Comme elles ont grandi ! murmura Hélène, qui éclata en larmes.

Toutes étaient là, sa fille seule manquait. M. Rambaud la fit entrer dans le pavillon ; mais elle resta sur la porte, elle voulait voir le cortége se mettre en marche. Des dames vinrent la saluer discrètement. Les enfants la regardaient, de leurs yeux bleus étonnés.

Cependant, Pauline circulait, donnait des ordres. Elle étouffait sa voix pour la circonstance ; mais elle s’oubliait par moments.

— Allons, soyez sages… Regarde, petite bête, tu es déjà sale… Je viendrai vous prendre, ne bougez pas.

Le corbillard arrivait, on pouvait partir. Madame Deberle parut et s’écria :

— On a oublié les bouquets !… Pauline, vite les bouquets !

Alors, il y eut un peu de confusion. On avait préparé un bouquet de roses blanches pour chaque petite fille. Il fallut distribuer ces roses ; les enfants, ravies, tenaient les grosses touffes devant elles, comme des cierges. Lucien, qui ne quittait plus Marguerite, respirait avec délices, pendant qu’elle lui poussait ses fleurs dans la figure. Toutes ces gamines, avec leurs mains fleuries, riaient dans le soleil, puis devenaient tout d’un coup sérieuses, en suivant des yeux la bière que des hommes chargeaient sur le corbillard.

— Elle est là dedans ? demanda Sophie très-bas.

Sa sœur Blanche fit un signe de tête. Puis, elle dit à son tour :

— Pour les hommes, c’est grand comme ça.

Elle parlait du cercueil, elle élargissait les bras