Aller au contenu

Page:Encyclopédie méthodique - Amusements.djvu/16

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
ACO ACO 5


est possible. Qu’on rende l’air peu à peu, le son renaîtra, pour ainsi dire, & augmentera à mesure que l’air contenu dans la machine approchera de la constitution de celui de l’atmosphère.

De ces deux expériences il résulte que le son, considéré dans les corps sonores, n’est autre chose que les vibrations suffisamment promptes de leurs parties insensibles ; que l’air en est le véhicule, & qu’il le transmet d’autant mieux, que par sa densité, il est plus capable de recevoir lui-même dans ses parties un mouvement semblable.

A l’égard de la manière dont le son affecte notre ame, on doit sçavoir qu’à l’entrée de l’oreille interne, qui contient les différentes parties de l’organé de l’ouïe, est une membrane tendue comme celle d’un tambour, à laquelle on donne aussi le nom de tympan de l’oreille. Il est fort probable que les vibrations de l’air, produites par le corps sonore, en excitent dans cette membrane ; que celles-ci en produisent de semblables dans l’air dont la cavité de l’oreille interne est remplie, & que le retentissement y est augmenté par la construction particulière & les circonvolutions tant des canaux demi-circulaires que du limaçon ; ce qui occasionne enfin dans les nerfs dont ce limaçon est tapissé, un mouvement qui se transmet au cerveau, & par lequel l’ame reçoit la perception du son. Il faut s’arrêter ici, car il n’est pas possible de sçavoir comment le mouvement des nerfs peut affecter l’ame ; mais il nous suffit de savoir par l’expérience, que les nerfs sont, pour ainsi dire, les médiateurs entre cette substance qui forme notre ame, & les objets extérieurs & sensibles.

Le son ne tarde pas à cesser, dès que les vibrations du corps sonore cessent ou deviennent trop foibles. C’est ce que l’expérience montre encore ; car lorsque, par le contact d’un corps mou, on amortit ces vibrations dans le corps sonore, le son semble cesser tout-à-coup. C’est pour cela que, dans la construction d’un clavessin, les sauteraux sont garnis d’un morceau de drap, afin qu’en retombant il touche la corde, & amortisse ses vibrations. Au contraire, lorsque le corps sonore est, par sa nature, en état de continuer ses vibrations pendant long-tems, comme l’est une grosse cloche, le son continue long-tems après le coup : c’est ce qu’il n’y a personne qui n’ait remarqué, en entendant sonner une cloche d’un capacité un peu considérable.

Sur la vitesse du son : expériences pour la déterminer : manière de mesurer les distances par ce moyen.

Il n’en est pas du son comme de la lumière, qui se transmet d’un lieu à un autre avec une rapidité inconcevable. La vitesse du son est assez médiocre, & est a peine de 200 toises par seconde. Voici comment on l’a mesurée.


A l’extrémité d’une distance de quelques milliers de toises, qu’on tire un coup de canon ; qu’un observateur, placé à l’autre extrémité avec un pendule à secondes, ou, ce qui fera mieux, avec un pendule à demi-secondes, soit attentif au moment où il apperçoit le feu, & laisse dans le même instant échapper son pendule ; qu’il compte le nombre des secondes ou demi-secondes écoulées depuis le moment où il a apperçu le feu & lâché son pendule, jusqu’au moment où il entend le bruit de l’explosion : il est évident que, si l’on regarde le moment où il a apperçu le feu comme le moment de l’explosion ; il n’aura qu’à diviser par le nombre des secondes ou des demi-secondes comptées, celui des toises que comprend la distance où il est du canon, & il aura le nombre de toises parcourues par le son en une seconde ou une demi-seconde.

Or, l’on peut prendre le moment où l’on apperçoit le feu, à quelque distance que l’on soit pour le vrai moment de l’explosion ; car la vitesse de la lumière est telle, qu’elle met à peine une seconde à parcourir 40 demi-diamètres de la terre, ou environ 60 mille de nos lieues.

C’est par de semblables expériences que MM. de l’académie royale des sciences ont anciennement trouvé que le son parcouroit dans une seconde 1172 pieds de Paris. MM. Flamsteed & Halley ont trouvé 1172 pieds anglois, qui se réduisent à 1070 pieds de France. Comme il est bien difficile de se déterminer entre ces autorités, nous prendrons pour la vitesse moyenne du son la quantité de 1120 pieds de France.

Il est à remarquer que, suivant les expériences de M. Derham, la température de l’air, quelle qu’elle soit, seche ou humide, froide, tempérée, ou chaude, ne fait point varier la vitesse du son. Il étoit à portée de voir la lumière & d’entendre le bruit du canon qu’on tiroit fréquemment à Blacheat, éloigné de 9 à 10 milles d’Upminster, lieu de sa demeure. Quel que fût le tems, pourvu qu’il n’y eût point de vent, il comptoir t toujours le même nombre de demi-secondes entre le moment où il appercevoit le feu & celui où il entendoit le bruit : mais quand il y avoit du vent qui portoit de l’un à l’autre de ces lieux, ce nombre varioît de 111 jusqu’à 122 secondes. On conçoit en effet que le vent transportant le fluide mis en vibration du côté de l’observateur, elles doivent plutôt l’atteindre que si ce fluide étoit en repos, ou mu en sens contraire.

Quoi qu’en dise néanmoins M. Derham, nous ne pouvons nous persuader que la température de l’air ne fasse rien à la vitesse du son ; car un air plus chaud, & par conséquent plus raréfié ou plus élastique, doit avoir des vibrations plus