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Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T2.djvu/393

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FEC FEN

Un préjugé répandu chez presque tous les écrivains, a contribué jusqu’ici à faire croire que les temples grecs ne recevoient point de lumière dans leur intérieur. Cette opinion est résultée de ce qu’on n’a point vu de fenêtres aux murs du plus grand nombre des temples romains conservés jusqu’à nos jours, & de ce que les temples périptères de la Grèce, dont les voyageurs modernes nous ont donné les dessins & les descriptions, n’ont pas non plus de fenêtres.

Cependant cette opinion ne peut pas soutenir l’examen. Il est certain d’abord, quant aux temples romains, que ceux qui étoient circulaires étoient éclairés ou d’en-haut, comme le Panthéon, ou par des fenêtres de côté, comme les temples de Vesta à Rome & de Tivoli, dont les chambranles subsistent encore, ou par des clathri ou treillis, comme on en voit sur des bas-reliefs à plus d’un temple sphérique, ou simplement par leur porte.

L’ouverture de la porte étoit ensuite, pour beaucoup de temples quadrangulaires d’une petite ou d’une moyenne étendue, tels que les temples de Nimes & celui d’Affise, un moyen suffisant d’éclairer l’intérieur de la cella, & souvent encore des jours pratiqués au-dessus de la porte d’entrée, devoient y augmenter la lumière.

Mais à l’égard des grands temples, au nombre desquels on doit mettre les temples périptères d’ordre dorique de la grande Grèce, de la Sicile & de la Grèce proprement dite, il est prouvé que l’ouverture de la porte abritée & renfoncée sous les colonnes du prostylon & du pronaos, c’est-à dire, à trente ou quarante pieds du jour, n’auroit pu éclairer l’intérieur d’une cella de cent pieds de long, comme étoit celle des temples de Minerve à Athènes & de Jupiter à Olympie ; & cependant, lorsqu’on parcourt avec Pausanias l’intérieur de ces temples remplis de toutes les curiosités de l’art, lorsqu’on pense qu’on y voyoit des colosses d’or & d’ivoire, des troncs ornés de peintures & de bas-reliefs, il est impossible de se persuader que de tels chefs-d’œuvre auroient été renfermés dans des espèces d’antres obscurs & impénétrables aux rayons du jour.

La ressource de la lumière artificielle des lampes & des candélabres s’offre bien à l’esprit ; mais outre qu’elle eût été insuffisante pour éclairer des colosses & des compositions de cette étendue, on doit dire encore que cette opinion n’auroit pour elle aucune autorité chez les écrivains. Un très-grand nombre de passages relatifs à l’intérieur des temples, non-seulement donnent à entendre, mais forcent de croire qu’ils étoient éclairés de la lumière du jour ; & quant à la lumière des lampes, on est fondé à penser qu’elle n’étoit employée, comme dans les temples chrétiens, que par un motif religieux.

Une supposition s’est présentée à l’esprit de quelques critiques pour accorder, dans les temples de Minerve & de Jupiter à Olympie, le besoin que leur intérieur avoit de lumière, avec l’opinion que ces édifices ne devoient point avoir de fenêtres. Comme ces deux temples avoient leur intérieur orné de deux rangs de colonnes, & que ce genre de disposition est du nombre de celles que Vitruve a affectées à la cinquième espèce de temples qu’il appelle hypæthre, ou dont le milieu, selon lui, devoit être découvert, on a présumé que les temples à deux rangs de colonnes intérieures étoient tous du genre hypæthre, & que dans cette donnée, ce que Vitruve appelle le milieu, medium sub divo, s’étendoit à toute la cella ; que dès-lors le naos intérieur étoit sans couverture, & qu’ainsi il recevoit toute la lumière du jour.

Mais alors, nouvel inconvénient. Comment supposer que des ouvrages aussi précieux & aussi délicats par leur travail, que susceptibles des impressions de l’air par leur matière, auraient été abandonnés à toutes les intempéries des saisons ? Est-il bien vrai d’ailleurs que tous les temples qui avoient deux rangs de colonnes l’un au-dessus de l’autre, aient été du genre appelé hypæthre par Vitruve, & que le temple que Vitruve désigne par ce pont ait eu tout son intérieur découvert ? (Voyez, à cet égard, le mot Hypæthre, où l’on donne une solution de ces questions.)

M. Stuart, dans ses Antiquités d’Athènes, a proposé l’opinion que les voiles de temple (parapetasinata) pouvoient, dans les temples découverts, abriter les statues par leur position horizontale. Mais nous verrons au mot Parapetaima, que cette position fut toujours verticale.

Au reste, on dira ici d’avance, que le passage de Vitruve sur le temple hypæthre, n’emporte point la conséquence que tout l’intérieur de la cella fut découvert ; mais que seulement on doit en conclure que le milieu du temple ou du naos étoit percé à jour, ce qui fut commun aux temples de plusieurs divinités, qu’ils aient eu ou non deux rangs de galeries intérieures. Le passage de Vitruve, medium autem sub divo est sine tecto, est donc une autorité de plus en faveur de l’opinion, que les temples qui n’avoient point de fenêtres latérales, & qui ne pouvoient recevoir assez de jour par leur porte, étoient éclairés par des ouvertures de comble ; & il est impossible d’avoir une autre opinion à l’égard de ceux des autres temples périptères grecs qui ne peuvent être supposés du genre prétendu hypæthre de Vitruve, cest-à-dire, qui n’avoient pas les deux rangs de galeries intérieures.

Plus d’une autorité recueillie chez les écrivains montre que les ouvertures ou fenêtres de comble furent fréquemment pratiquées dans les temples des Anciens ; & si l’on rapproche de cette notion, la facilité qu’ils eurent dans des toits & des plafonds, la plupart en charpente, de ménager des jours ou latéraux ou verticaux, il faudroit s’étonner, non qu’ils aient usé de ce moyen, mais qu’ils l’aient négligé.

Plutarque enfin nous a fourni à cet égard un