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distribution intérieure des prisons, seroit la matière d’un ouvrage, où l’architecte trouveroit des notions propres à le diriger dans les ouvrages de ce genre qu’on lui demanderoit.

Il suffira à cet article d’indiquer par quelques notions générales, les diverses manières de pratiquer les prisons, selon la variété de leur destination. Nous dirons ensuite ce que doit être à l’extérieur une prison, considérée architectoniquement, sous le rapport du caractère qui doit la distinguer.

Jusqu’ici, généralement il a été construit fort peu d’édifices, destinés à être spécialement et exclusivement des prisons. Tant qu’on ne vit dans une prison qu’un local propre à séquestrer les individus, sans distinction des causes de détention, du genre de délit, et de la nature des reclus, beaucoup de bâtimens tout faits, quoique pour d’autres usages, dûrent paroître propres à leur nouvelle destination. Ainsi une multitude de constructions élevées dans le moyen âge, beaucoup de vieux châteaux, de forteresses désormais inutiles à la guerre, furent et devinrent des prisons toutes faites. Ainsi nous avons vu Paris jusqu’à un demi-siècle en arrière, n’avoir guère d’autres prisons que d’anciens castels, qu’on appeloit châtelets, quelques forts placés jadis comme défenses, et faisant partie de la circonvallation de ses murs.

De ce genre furent surtout, et sont encore, dans beaucoup de pays, les prisons qu’on appelle prisons d’état. Aucune n’exige plus de sûreté, plus de facilité pour empêcher toute communication ou correspondance avec les prisonniers. Les délits dont ils sont prévenus, le caractère de ceux qui le plus souvent sont sous le poids d’une accusation politique, et qui tiennent à quelque parti, veulent qu’ils soient entièrement isolés et mis au secret, dans l’intérieur, et que rien du dehors ne leur parvienne. Les forteresses du moyen âge, devenues des défenses aujourd’hui inutiles, par les changemens survenus dans l’attaque des places, ont tout ce qu’exige une prison d’état ; des murs fort épais, peu de fenêtres et de petites ouvertures, des fossés pleins d’eau qui les isolent, des ponts-levis, des guichets, etc. On citeroit, je pense, peu de prisons d’état en Europe, qui ne soient placées dans de semblables constructions, et s’il en falloit faire exprès, il seroit peut-être difficile d’y réunir plus de convenances.

Mais les prisons, dans leur rapport avec la saine police des villes et les institutions sociales, doivent être, soit pour leur distribution intérieure, soit pour leur emplacement et leur construction, l’objet d’une classification spéciale qui déterminera le genre de chacune.

On a déjà fait observer combien sont diverses entr’elles, les causes qui décident dé l’arrestation et de la détention des individus. Le pire de tous les régimes en ce genre, est celui qui tend à confondre et à réunir entr’eux, dans le même local, non-seulement les prévenus avec les condamnés, mais les prévenus d’un certain genre de délit, avec ceux d’un autre genre.

Il semble donc qu’il devroit y avoir une prison particulière, ou si l’on veut, dans la même enceinte, un espace séparé, pour tous ceux qui sont détenus par simple prévention, par mesure de prévoyance, comme impliqués dans une affaire criminelle, et qu’il importe d’isoler de l’accusé principal. Or, rien ne seroit plus facile à réaliser dans le plan bien entendu d’une prison. Jusqu’ici, l’économie de gardiens et la facilité dessoins de la surveillance, ont porté à réunir le plus possible de prisonniers dans un même local. Il est certain que cette réunion tend à diminuer le nombre des surveillans. Mais il est peut-être vrai aussi, que des divisions bien faites seroient un grand moyen d’ordre et de tranquillité.

Sans aucun doute il faut une prison particulière pour ceux qui sont condamnés à la peine de détention. C’est ici que doit avoir lieu une distribution intérieure, qui permette de classer les détenus selon la gravité du délit et la durée de la peine, selon les âges, et aussi selon l’état des personnes. On ne sait que trop, combien Ia fréquentation d’hommes très-diversement coupables, peut être dangereuse, et combien une peine faite pour corriger des inclinations vicieuses, loin de produire cet effet, enhardira, par de funestes leçons, à s’enfoncer dans le vice.

On est parvenu depuis du temps, d’après l’exemple de quelques pays, à introduire dans les prisons de correction, un régime de travail proportionné à l’âge, aux facultés, à l’industrie des prisonniers. Cet établissement, outre l’avantage d’obvier aux dangers de l’oisiveté, mère de tous les vices, a pour objet d’offrir des ressources utiles à ceux qui, après le temps de leur réclusion, sont rendus à la société. La vente des objets fabriqués tourne à la fois au profit de l’établissement et des prisonniers, auxquels on rend, lorsqu’ils sortent, les épargnes qu’on a faites pour eux.

Une semblable prison demandera de grandes et belles dispositions, pour les différentes salles de travail, pour les magasins et dépôts d’objets fabriqués, pour les logemens des inspecteurs, gardiens, concierges, etc.

Il est une sorte de prison qui semble demander dans son intérieur des dispositions toutes particulières, et qui s’éloigneront de la sévérité du régime que les autres nécessitent. On veut parler des prisons pour dettes. La réclusion est moins ici l’effet d’une peine prononcée par la loi, qu’un moyen de contrainte légale, exercée par le créancier contre son débiteur, pour en obtenir le paiement. S’il y a des débiteurs qui frustrent leurs créanciers par fraude, il s’en trouve aussi que des accidens imprévus rendent insolvables. La loi, pour l’intérêt du commerce, permet la contrainte, mais l’équité veut qu’on ne confonde pas de sem-