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Page:Encyclopédie méthodique - Architecture, T3.djvu/386

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378 5EV SEV


beaucoup plus général, exprime une multitude derapports plus ou moins gênans, auxquels l’architecte est tenu d’avoir égard, dans la conception et l’exécution de ses projets ; et ces rapporta dépendent des besoins divers, souvent des caprices des particuliers, quelquefois aussi des convenances locales et impérieuses du terrain et de son site. Voyez SUJÉTION.

SÉVÈRE, SÉVÉRITÉ. On donne ce nom, dans tous les arts, à une sorte de goût, de style, de manière dont un ouvrage est conçu el exécuté, et par suite on le donne encore à l’ouvrage même.

Sévère est l’opposé d’agréable. Le style sévère, dans un édifice, est celui qui n’y admet que ce qui constitue le nécessaire, et néglige toutes les formes, tous les ornemens accessoires, d’où résulte l’impression de la variété, de la richesse et du luxe.

Le plus nécessaire, dans un édifice quel qu’il soit, est, sans contredit, la solidité. Mais l’architecture exige le mérite de la solidité, d’abord dans la réalité de la chose, ensuite dans son apparence. La solidité réelle et positive peut tenir uniquement et à certains matériaux, et à un certain emploi de ces matériaux, dont l’effet n’aura aucun rapport sensible avec le goût, ni avec les impressions de nos sens. Mais la solidité apparente résulte de certaines dispositions de masses, d’un certain accord entre les pleins et les vides, d’une certaine rectitude de lignes, qui produisent l’impression de la qualité qu’on appelle sévérité.

Ainsi des masses uniformes, de grandes surfaces lisses, de grandes parties rectilignes sans ressaut, sans interruption, porteront le caractère d’une grande solidité, parce que l’instinct seul, sans parler du raisonnement, nous apprend que le temps et la destruction ont moins du prise sur ce qui est simple, que sur ce qui est composé. Voyez SOLIDITÉ

Qui ne voit au contraire, que la diversité des masses, la multiplicité des percés, les plans contournes et mixtilignes, ne peuvent point ne pas produire pour l’esprit, le sentiment de foiblesse et d’inconsistance, comme ils doivent en opérer l’effet dans la réalité ?

Ce qu’on appelle sévérité en architecture, tiendra donc à une grande simplicité de plan, à une grande uniformité d’élévation, el aussi à une grande économie d’ornemens.

On entend peut-être mieux la sévérité sous ce dernier rapport.

Effectivement, c’est ainsi qu’on l’explique, et qu’on la définit dans les arts du discours. On y distingue le style sévère et le style orné. Le premier est celui des écrivains et des orateurs ordinairement les plus anciens, qui, dans chaque sujet, occupés principalement des choses plus que des mats, jaloux d’instruire plutôt que du plaire, de prouver, eu s’emparant de la raison plutôt que


de l’imagination, ont négligé les charmes de la diction, et préféré la solidité de la logique aux fleurs de la rhétorique. On reconnoît le style orné, à une certaine prétention dans la variété des tournures dans le choix des formes, dans la recherche des images, dans le soin de flatter agréablement l’oreille par des mouvemens cadencés, et des chutes variées.

Il en est de même du style sévère en architecture. Les maîtres de ce style se font remarquer par l’attention qu’ils portent, avant tout, aux qualités fondamentales de l’art de bâtir, par le soin qu’ils ont de ne rien mettre de superflu dans leurs compositions, de s’en tenir à l’expression propre de chaque caractère, et à l’exécution scrupuleuse des proportions de chaque ordre, de ne rien innover dans les types reçus, de subordonner les ornemens, c’est-à-dire l’agréable à l’utile, c’est-à-dire aux formes constitutives des membres dont se compose lu corps d’un édifice.

Si l’on veut retourner cette définition et prendre l’inverse de chacune des notions qu’elle renferme on trouvera qu’il s’est donné dans l’architecture nu style remarquable par l’affectation de nier ou de dissimuler ce qui est le principal d’un édifice, et de faire prévaloir sur le nécessaire, précisément ce qui est le superflu, par la prétention à une variété de formes, de lignes, de contours, tendante à détruire toute idée d’ordre, de type constitutif et indicatif de chaque caractère, remarquable surtout par l’ambition des nouveautés, plaisir le desir de flatter les yeux, au préjudice du plaisir de l’esprit et de la raison.

En appliquant la notion de ces deux styles aux monumens de l’architecture, il n’y a personne qui ne range sous l’indication du premier, c’est-à-dire du style sévèrê, le plus grand nombre des édifices du quinzième et du seizième siècle. Je dis le plus grand nombre, parce qu’il s’y en trouve, parmi ceux du quinzième, quelques-uns, surtout a Florence, où la sévérité peut paroître excessive, et d’autres, parmi ceux du seizième siècle, qui tiennent un milieu très-heureux entre la sévérité et le relâchement des principes : car la sévérité a aussi différens degrés. Mais personne n’hésitera d’appliquer la notion du second style, c’est-à-dire opposé, au style sévère, au goût qui régna dans le dixseptième siècle.

L’idée précise de sévérité, en architecture, peut être rendue sensible à l’esprit comme aux yeux, dans les ordres, par le dorique grec, où le principe de solidité, de nécessité, d’utilité, se trouve écrit en caractères qu’aucun œil ne peut méconnoitre.

Cette idée se manifeste encore clairement dans certains édifices, du genre de ceux qui ne sauroient, sans une inconvenance révoltante, admettre ni les variétés de formes, ni le luxe des ornemens, ni les badinages des détails, auxquels le caprice aime à se livrer. Tels sont des portes de