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la charge ridicule des originaux qu’ils ont voulu copier ! Combien de danseurs, de peintres & de musiciens se sont perdus en suivant cette route facile, mais pernicieuse, qui mèneroit insensiblement à la destruction & à l’anéantissement des arts, si les siècles ne produisoient toujours quelques hommes rares qui, prenant la nature pour modèle & le génie pour guide, s’élèvent d’un vol hardi & de leurs propres ailes à la perfection !

Touts ceux qui sont subjugués par l’imitation oublieront toujours la belle nature, pour ne penser uniquement qu’au modèle qui les frappe & qui les séduit ; modèle souvent imparfait, & dont la copie ne peut plaire.

Questionnez les artistes ; demandez-leur pourquoi ils ne s’appliquent point à être originaux, & à donner à leur art une forme plus simple, une expression plus vraie, un air plus naturel ; ils vous répondront pour justifier leur indolence & leur paresse, qu’ils craignent de se donner un ridicule, qu’il y a du danger à innover, à créer ; que le public est accoutumé à telle manière, & que s’en écarter ce seroit lui déplaire. Voilà les raisons sur lesquelles ils se fonderont pour assujettir les arts au caprice & au changement, parce qu’ils ignoreront qu’ils sont enfans de la nature, qu’ils ne doivent suivre qu’elle, & qu’ils doivent être invariables dans les règles qu’elle prescrit. Ils s’efforceront enfin de vous persuader qu’il est plus glorieux, de végéter & de languir à l’ombre des originaux qui les éclipsent & qui les écrasent, que de se donner la peine d’être originaux eux-mêmes.

M. Diderot n’a eu d’autre but que celui de la perfection du théâtre ; il vouloit ramener à la nature touts les comédiens qui s’en sont écartés. M. de Cahusac rappeloit également les danseurs à la vérité ; mais tout ce qu’ils ont dit a paru faux, parce que tout ce qu’ils ont dit ne présente que les traits de la simplicité. On n’a point voulu convenir qu’il ne falloit que de l’esprit pour mettre en pratique leurs conseils. Peut on avouer qu’on en manque ? Est-il possible de confesser que l’on n’a point d’expression ? Ce seroit convenir que l’on n’a point d’ame. On dit bien, je n’ai point de poumons ; mais je n’ai jamais entendu dire, je n’ai point d’entrailles. Les danseurs avouent quelquefois qu’ils n’ont point de vigueur, mais ils n’ont pas la même franchise lorsqu’il est question de parler de la stérilité de leur imagination. Enfin les maîtres de ballets articulent avec naïveté qu’ils ne composent pas vite & que leur métier les ennuie ; mais ils ne conviennent point qu’ils ennuient à leur tour le spectateur, qu’ils sont froids, diffus, monotones, & qu’ils n’ont point de génie. Tels sont la plupart des hommes qui se livrent au théâtre ; ils se croient tout parfaits. Aussi n’est-il pas étonnant que ceux qui se sont efforcés de leur dessiller les yeux, se dégoûtent & se repentent même d’avoir tenté leur guérison.

L’amour-propre est dans toutes les conditions & dans touts les états un mal incurable. En vain cherche-t-on à ramener l’art à la nature, la désertion est générale ; il n’est point d’amnistie qui puisse déterminer les artistes à revenir sous ses étendards, & à se rallier sous les drapeaux de la vérité & de la simplicité. C’est un service étranger qui leur seroit trop pénible & trop dur. Il a donc été plus simple de dire que M. de Cahusac parloit en auteur & non en danseur, & que le genre qu’il proposoit étoit extravagant. On s’est écrié par la même raison, que le fils naturel & le père de famille n’étoient point des pièces de théâtre, & il a été plus facile de s’en tenir là que d’essayer de les jouer ; au moyen de quoi les artistes ont raison, & les auteurs passent pour des imbécilles. Leurs ouvrages ne sont que des rêves faits par des moralistes ennuyeux & de mauvaise humeur, ils sont sans prix & sans mérite. Eh ! comment pourroient-ils en avoir ? Y voit-on touts les petits mots à la mode, touts les petits portraits, les petites épigrammes & les petites saillies ? car les infiniment petits plaisent souvent à Paris. J’ai vu un temps où l’on ne parloit que des petits enfans, que des petits comédiens, que des petits violons, que du petit anglois & que du petit cheval de la foire.

Il seroit avantageux pour la plus grande partie de ceux qui se livrent à la danse & qui s’adonnent aux ballets, d’avoir des maîtres habiles qui leur enseignassent toutes les choses qu’ils ignorent & qui sont intimement liées à leur état. La plupart dédaignent & sacrifient toutes les connoissances qu’il leur importoit d’avoir, à une oisiveté méprisable, à un genre de vie & de dissipation qui dégradent l’art & avilissent l’artiste. Cette mauvaise conduite trop justement reprochée, est la base du préjugé fatal qui règne indifféremment contre les gens qui se consacrent au théâtre ; préjugé qui se dissiperoit bientôt, malgré la censure amère du très-illustre cynique de ce siècle, s’ils cherchoient à se distinguer par les mœurs & par la supériorité des talens.

BATTEMENT. Mouvements en l’air que l’on fait d’une jambe, pendant que le corps est posé sur l’autre, & qui rendent la danse très-brillante, sur-tout lorsqu’ils sont faits avec légèreté,

La hanche & le genou forment & disposent ces mouvements : la hanche conduit la cuisse, pour s’écarter ou pour s’approcher ; & le genou par sa flexion forme le battement, en se croisant, soit devant, soit derrière l’autre jambe qui porte.

Supposé donc, que vous soyez sur le pied gauche, la jambe droite en l’air & bien étendue, il faut la croiser devant la gauche, en approchant la cuisse & en pliant le genou, & retendre en l’ouvrant à côté ; plier du même temps le genou en croisant derrière, puis l’étendre à côté, & continuer d’en faire plusieurs de suite, tant d’une jambe que de l’autre. On mêle les battements avec