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L’art de Nager 429


ger, de prendre un guide exercé & habile, qui veuille vous suivre pas à pas, & en vous montrant les principes les plus sûrs, vous avertisse en même temps de touts les dangers à éviter.

Celui qui se charge de cette fonction, doit d’abord reconnoître l’endroit qu’il a choisi pour vous donner ses leçons. Son examen doit surtout porter sur la profondeur de l’eau ; & ce préliminaire est aussi important pour le maître que peur le disciple. Cette précaution prîse, entrez hardiment dans l’eau ; couchez vous-y doucement sur le ventre ; tenez la tête & le cou droits, la poitrine avancée & le dos courbé en forme de demi-cercle. Retirez vos jambes, que leur poids retient au fond de l’eau ; étendez les sur sa surface ; avancez les bras, étendez-les, écartez-les & les rapprochez successivement sans trop de précipitation vers votre poitrine. Dans cet état, avancez fièrement au milieu de l’arène, en vous aidant des pieds & des mains, avec le plus de souplesse & d’agilité que vous le pourrez. Bannissez sur-tout la crainte, fatal obstacle qui ne retarde que trop communément les progrès des nageurs ; & j’ose vous promettre que, pour peu que vous ayez de dispositions, vous serez bientôt en état de maîtriser l’élément, qui vous paroît d’abord si formidable.

Ayez soin de vous soutenir de manière que l’eau ne monte pas plus haut que votre poitrine, & ne descende pas au-dessous des reins. Vous avalerez sans doute beaucoup plus d’eau que vous ne voudrez ; peut être même vous tourmenterez-vous beaucoup sans succès. Ne pensez pas pour cela avoir moins de disposition à bien nager. C’est le sort commun à touts ceux qui entrent dans cette carrière, d’être suffoqués par l’eau, avec laquelle ils ne sont pas encore familiers. On peut d’ailleurs pour animer votre courage, vous donner du secours en pareille occasion. Rien n’empêche que votre maître ne vous soutienne le menton, & ne vous conduise ainsi, comme par la main. Si vous apprenez seul, vous pourrez vous aider d’un faisceau de jonc, ou de vessies de porc pleines de vent, ou de calebasses. Ces sortes d’instruments font les meilleurs guides dont on puisse se servir, quand en commence à nager, si l’on est privé d’un Mentor.

Différentes manières de se retourner en nageant.

On met ordînaîremeot en usage plusieurs façons de se retourner en nageant. D’abord, tournez la paume de la main droite en dehors ; étendez le bras de même, & faites un mouvement contraire de la maint & du bras gauche. Ensuite, penchez peu-à-peu la tête & tout le corps sur le côté gauche, & insensiblement votre évolution se trouvera finie.

Voulez-vous que je vous apprenne une autre manière plus facile encore que cette dernière ? Inclinez la tête & le corps du côté que vous aurez choisi pour retourner. Tournez ensuite les jambes de la manière que je viens de vous indiquer, pour la conversion ordinaire. Si vous voulez vous tourner sur la gauche, inclinez le pouce de la main droite vers le fond de l’eau, courbez les doigts, étendez la main droite, avec laquelle vous chasserez de côté les eaux de devant. Poussez en même temps ces mêmes eaux en arrière avec la main gauche étendue & les doigts joints, & retirez tout d’un coup votre corps & votre visage sur la gauche. Pour se retourner sur la droite, il faut observer les mêmes précautions en sens contraire.

Remarquez, & cette observation est importante, lorsque vous voulez vous tourner de cette manière, de ne pas écarter les jambes, & qu’il y ait assez d’eau pour que vous n’ayez pas à craindre de vous heurter le dos contre les bancs qui tapissent le fond de la rivière. Le coup violent que vous recevriez ainsi par votre faute, pourroit en vous étourdissant vous plonger dans les bras de la mort.

Il y a une troisième façon de se retourner dans l’eau, & que l’on pratique en faisant la cloche. On n’a besoin que d’une fort médiocre étendue d’eau pour y réussir. Elle se fait avec autant de succès quand on nage sur le ventre que lorsqu’on nage sur le dos ; & dans l’un & l’autre cas, on prend un chemin contraire à celui qu’on suivoit auparavant. Si vous nagez sur le ventre, retirez précipitamment vos pieds, rejettez-les en avant, étendez les mains en arrière, & tenez votre corps ferme & assuré. Nagez-vous sur le dos ? ployez tout d’un coup les pieds sur vos fesses, & en les rejettant aussitôt vers le fond, élancez-vous avec force pour vous porter le ventre sur l’eau. Observez sur-tout qu’en pareille occasion, l’eau ait une profondeur assez considérable, & que vous n’alliez vous embarrasser dans la vase ou les herbes, où vont quelquefois malheureusement se perdre les plus habiles.

Il y a une quatrième manière de se tourner, qui s’exécute en roulant de droite à gauche & de gauche à droite, comme fait un globe sur son axe. Voici comment il faut s’y prendre pour y réussir. Si vous nagez sur le ventre, & que vous vouliez tourner sur la gauche, il faut étendre fortement le bras droit, & le pousser le plus que vous pourrez en avant. Renversez ensuite le visage, la poitrine & tout le corps vers la gauche ; & en élevant ainsi la droite à fleur d’eau, vous vous trouverez sur le dos, d’où vous pourrez passer sur le ventre avec la même rapidité, sî vous le jugez à propos. Pour mettre plus de célérité, de sûreté même dans ces différents changements, il ne faut pas négliger de rapprocher les jambes l’une de l’autre le plus qu’il vous sera possible, & d’étendre sur la poitrine les bras sur la même ligne, & fort près l’un de l’autre.

J’ajouterai enfin une dernière manière de se tourner ; c’est celle que l’on met en œuvre quand on est sur le dos, pour passer sur le ventre. Cette évolution, semblable en apparence à celle qu’on exécute en roulant, est tout-à-fait différente. Celle-ci exige la plus grande rapidité. Celle-là, au contraire, s’exécute avec d’autant plus de succès, qu’on y met plus de lenteur & de circonspection.