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ci, afin de ne la point endommager & on retire doucement le coin, en tenant l'écorce soulevée avec l’instrument en Z, ou à crochet, & la greffe prend sa place.

La greffe doit être taillée sur la longueur d'un pouce au moins, en manière de coin ; mais la réussite exige qu'elle ne soit taillée que d'un côté, de manière que le bois de la greffe corresponde directement & touche le bois de l’arbre ; & du côté extérieur, que l'écorce touche à l’écorce dans le plus grand nombre de point possibles. Afin de mieux assujettir la greffe, on doit laisser un cran ou espèce d'entaille du côté du bois, & lorsque le tout est mis en place dans la situation convenable, on l'assujettit avec des liens, ainsi qu'il a été dit plus haut.

De la Greffe en canon ou sifflet.

On choisit une branche bien saine & de l'année précédente, lorsqu'on le peut, que l'on coupe à quelques pouces près du tronc, ou plus éloigné, suivant sa force & sa grosseur, qui doivent décider de ce retranchement. Avec le tranchant de la serpette, on fend l'écorce en lanières, qui sont ensuite doucement détachées du bois, sans les meurtrir.

Pendant qu'un ouvrier exécute cette opération, un autre prépare l’anneau ou cylindre, ou flûte garnie de son bouton, ou de plusieurs boutons, & d'un diamètre égal, s'il se peut, à celui du bois mis à nu. Alors, sans perdre de tems, l’on fait glisser sur ce bois, jusqu'à ce que sa base soit parvenue à la naissance des lanières. Si le cylindre qui s'applique sur le bois est dans une proportion avec lui, & s'il recouvre tout le bois & s’unit exactement avec lui, on coupe circulairement les lanières au dessous de ce cylindre ; & après avoir fait rencontrer & joindre les deux écorces, on recouvre cette union, ainsi que le sommet du bois & du chalumeau, avec l'onguent de S. Fiacre.

Roger donne une autre manière de greffer par juxtaposition. La voici : c'est lui qui parle.

Je perce l’écorce lisse & unie d’un poirier, & j'y fais un trou d'environ un pouce de profondeur, puis avec une gouge de menuisier, j'unis la plaie, surtout à l’endroit de l’écorce. Je prends ensuite la mesure de la profondeur du trou, & je diminue par le bout mon rameau en forme de cheville ronde, en observant qu'il soit de la même grosseur que la vrille. Après l'avoir fait entrer un peu à force, & l'avoir enfoncée jusqu’au fond du trou, j’observe que l’écorce de la tige de l’arbre & celle du rameau se touchent de toutes parts, après quoi j’enduis cet endroit avec de l’onguent de S. Fiacre. Le rameau étant


toujours de la pousse précédente, je lui lisse trois ou quatre yeux. Cette manière de greffer doit se faire au commencement de germinal.

Des Greffes en écusson.

On appelle écusson un morceau d'écorce de douze à quinze lignes de longueur sur trois à quatre de largeur, garnie d'un bon œil dans son milieu. C'est de sa forme, qui ressemble à un écusson d'armoirie, que ce morceau d'écorce a pris son nom & qu'il a été consacré à ce genre de greffe.

Pour enlever l'écusson de dessus la branche, on fend l'écorce de celle-ci tout autour de l’œil, en observant de lui donner la forme de l'écusson ou d'un triangle. Après cette première opération, il faut enlever l'écusson, sans le meurtrir ni sans endommager l'œil. Pour cet effet, on presse, avec le pouce de la main droite, l'œil de l'écusson contre le bois, & on tourne lestement la main gauche, comme si on vouloit la tordre. Alors l’écusson se détache, parce que l'arbre étant en sève, l'écorce ne sauroit y être collée, & l’écusson cède facilement à l’impulsion qu'on lui donne.

Avec le tranchant de la lame du greffoir, on fait ensuite sur l'écorce de la branche à greffer, une incision en manière de cette figure T, ensuite avec la partie inférieure du greffoir on soulève doucement les deux parties de l'écorce coupée sur une largeur proportionnée à la moitié du diamètre de l’écusson, & l'on tient ces deux parties soulevées cc écartées jusqu'à ce qu'on ait placé l’écusson. Comme les deux mains sont occupées pendant le cours de cette opération, on tient avec l'extrémité de ses lèvres l’écusson ; ensuite, lorsque le soulèvement de l'écorce est fait & maintenu avec la main gauche ; on prend de la droite l'écusson, & on l'insinue dans l'ouverture. On observe avec soin que l'écorce de la partie supérieure de cet écusson corresponde & joigne en tous points l'écorce coupée de la partie transversale T, après avoir insinué le reste sous les deux parties de l'écorce soulevée, qui forment alors deux angles. L'écusson une fois bien placé, enfoncé & collé contre le bois ; vous ramenez les deux angles de l'écorce sur l’écusson, mais sans couvrir l'œil.

On doit avoir par avance préparé de petites ligatures, soit en laine, soit en coton (ce sont les meilleures, parce qu'elles ont la facilité de prêter & de s'étendre) soit en chanvre, écorce, brindilles d'osier, de saule, &c. le moment de les employer est venu. Prenez ce lien par le milieu, placez-le derrière la partie de la greffe, ramenez-le sur le devant, & recouvrez la ligne