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en H, & il renverse la terre sur la terre non labourée G qui est à côté, & il reste un sillon HL. Il va ensuite commencer une autre raie de M en N, renversant la terre sur une lesse de terre qui n'a point été labourée.

Et continuant ainsi jusqu'à la fin, toute la terre paroît labourée par de profonds sillons, quoique réellement on n'en ait labouré que la moitié. Ceux qui suivent cette méthode, n'ayant en vue que de détruire l’herbe, ils croyent faire des merveilles, parce que l’herbe qui est sur les endroits non labourés, est étouffée par la terre qu'on renverse dessus. Mais il ne s’agit pas seulement de faire périr l’herbe, il faut de plus remuer & atténuer la terre ; c'est ce que cette espèce de labour ne peut opérer. Il est vrai qu'au second labour on forme les sillons où étoient les éminences, qu'on renverse dans les anciens sillons. Mais qu'arrive-t-il de-là ? C'est qu'on croît avoir fait deux labours, & que réellement on n'en a fait qu'un, puique toute la terre n'a été remuée qu'une fois.

Quand les terres sont très-fortes, & argilleuses, on les laboure avec des charrues à versoir comme les précédentes ; mais leur soc n'est pas si large, & elles piquent plus avant en terre. C'est pourquoi il faut quatre chevaux pour les tirer, quoiqu'en faisant chaque raie on remue une moindre largeur de terre.

Les terres spongieuses (ou qui boivent l’eau) se labourent à plat, mais on est obligé de donner un écoulement à l’eau lorsque les terres la retiennent. C'est pour cela qu'on a coutume de former dans les terres argilleuses des sillons dans lesquels l’eau se ramasse & s'écoule comme dans des ruisseaux.

Quand les terres ne sont pas extrêmement sujettes à être inondées, on fait les raies à une plus grande distance les unes des autres ; c'est quelquefois à cinq toises, quelquefois à quatre, quelquefois à deux ; & les terres ainsi labourées s'appellent des terres labourées en planches.

Lorsque les terres sont plus sujettes aux inondations, on fait les sillons beaucoup plus près à près, ne laissant d'un sillon à l'autre que trois ou même deux pieds de distance, & ces terres sont dites labourées en billons.

Il faut expliquer comment on s'y prend pour donner cette forme aux guérets.

Supposons pour cela qu'on veuille labourer en planches la pièce ABCD, & qu'on se propose de placer les sillons en EEEE.

Le laboureur commence par ouvrir une raie de F en G, puis il en ouvre une autre de L en I qui remplit le sillon qu'il vient de former.


Il revient de H en K, renversant encore la terre du côté du sillon F, ce qui forme le milieu de la planche ; & continuant de labourer de M en N, de O en P, de Q en R, de S en T, une planche est formée, & elle est bordée de deux sillons ; ce qu'il falloit faire.

Souvent on laboure toute la terre à plat avec la charrue à versoir ; & quand tout le champ est ensemencé & hersé, l’on fait de distance en distance les raies EEEE qui forment les planches. Mais cette méthode n'est pas si bonne que la précédente, parce que les planches étant plates & bordées d'une petite élévation de terre, l’eau s'en écoule moins bien.

Pour labourer par billons, on ouvre un sillon, de A en B, puis allant de C en D, & de E en F, non-seulement on remplit le sillon, mais on forme en cet endroit une éminence qu'on nomme le billon, qui est bordée de deux sillons. On fait la même chose aux endroits GH, IK, & toute la pièce est labourée en billons.

Il y a aussi des paresseux qui ouvrent une raie de a en b, renversant la terre sur l’espace c c c qui n'a point été labouré ; puis ils ouvrent une autre raie de d en e, renversant encore la terre sur l’espace c c c. De cette façon, toute la terre paroît labourée, quoiqu'elle ne le soit effectivement qu'à moitié.

Il est inutile de faire observer que comme on ne fait tous ces sillons que pour égoutter les eaux, il faut les diriger suivant la pente du champ qu'on laboure, afin que l’eau s'écoule plus promptement.

Les terres légères ou douces qui ont été labourées à plat ou par grandes planches, sont ensemencées à sa main. La plus grande partie des grains tombe dans le fond des raies ; ensuite la herse abat les éminences des raies dans les petits sillons. De cette façon le bled est enterré, & il semble qu'il a été semé par petites rangées, ou comme dans des rigoles.

Il ne seroit pas possible de semer de même les terres très-fortes & argilleuses, parce que les mottes étant dures, la herse ne peut les briser, & saute dessus, & le bled seroit toujours mal enterré. C'est pourquoi l'on enterre le bled à la charrue, c'est-à-dire, qu'on répand la semence avant de donner le dernier labour qui renverse la terre & recouvre le grain.

Nous l’avons dit plus haut ; il ne convient pas de labourer toujours les terres de la même manière. C'est pourquoi une charrue, qui est propre à labourer une espèce de terre, ne vaut rien pour en labourer une d'un autre genre.