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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/163

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ressant & aimable, qui passe dans l’ame de ceux qui les observent ; effet merveilleux de cette correspondance que l’ame entretient sans cesse avec les organes du corps & avec les autres ames, au moyen des ouvrages artiels auxquels elle a présidé.

On doit sentir que peindre avec amour n’est pas précisément ce qu’on appelle peindre avec enthousiasme. Ce dernier sentiment plus exalté est un transport, l’autre une affection plus douce : l’un ressemble aux inspirations du trépied sacré, l’autre à celles que donne la pensée de s’approcher d’un objet qu’on aime. Aussi, l’on applique plus ordinairement le terme dont il s’agit dans cet article à des figures ou à des têtes de jeunes femmes, de jeunes hommes, d’enfans, & en général à des objets & à des expressions aimables qui ont rapport à la satisfaction, au plaisir, & à une sorte de volupté.

On pourroit désigner par les mêmes termes ces vers heureux, ces vers inspirés qui paroissent n’avoir coûté que le soin de les tracer. Chaulieul, La Fontaine, Voltaire, ont souvent écrit ou poëtisé (car on devroit, je crois, parler ainsi) avec amour, comme le Guide & le Corrège ont peint certaines figures ou certaines têtes. La prose de Fénelon semble s’être répandue, pour ainsi dire, sur son papier avec cette sensibilité si douce que le mot amour rappelle, & que quelque chose de bien semblable à l’amour, lui inspiroit peut-être sans qu’il le sût.

Il est des idées qu’on ne peut faire comprendre que par de simples indications. Ce sont des fleurs qu’on ne peut toucher long-temps sans les flétrir. De même le soin qu’on prendroit à analyser certains sentimens, altère l’idée qu’on s’efforce d’en donner. Souvent un mot remplit l’intention ; car il est un langage que les idiomes les plus riches ne peuvent traduire : c’est celui des ames sensible. Elles créent souvent des expressions ou employent des tours & des constructions qui expriment ce qu’on ne pourroit rendre par les moyens ordinaires. C’est ainsi que se forment & que s’établissent plusieurs mots & plusieurs acceptions qui ne conviennent qu’au sentiment & aux Arts libéraux. Le hasard semble les produire ; elles sont entendues & adoptées avec reconnoissance par ceux qui éprouvent des impressions semblables à celles qui les ont fait naître ; elles restent enfin consacrées dans la langue, & telle est vraisemblablement l’origine de la maniere de s’exprimer qui fait le sujet de cet article.

Je me permettrai de le terminer par quelques maximes qui regardent principalement les jeunes artistes.

Si vous peignez avec amour, on regardera vos ouvrages avec volupté. Oubliez donc qu’un tableau vous est commandé, & croyez, quand ce ne seroit qu’une illusion, que votre desir seul vous l’a fait entreprendre. Si vous dites, en prenant votre palette : « Il faut que je peigne, » vous ne peindrez pas avec amour. L’amant ne dit jamais : « il faut que j’aille voir ma maîtresse. » Le bel Art de la Peinture demanderoit une entiere indépendance ; elle ne peut exister dans nos sociétés. Il faut donc que le charme de la nature & le penchant irrésistible pour l’Art s’emparent tellement de l’ame du Peintre, qu’ils lui cachent ce qu’il y a d’asservissant dans son état. Il faut qu’il voie, par-dessus tout, les beautés des objets qu’il imite, qu’il sente habituellement le desir de les faire passer dans ses ouvrages ; qu’il se prête même à jouir par anticipation du plaisir d’atteindre il son but. Lorsque, rempli de ces dispositions, vous vous occupez, en vous couchant, de la satisfaction que vous aurez, dès qu’il fera jour, à reprendre vos pinceaux, vous peindrez avec amour. Si vous êtes au comble de la joie d’avoir trouvé un beau modèle, de voir naître un beau jour, de rencontrer un beau paysage ; si vous oubliez les heures, si vous vous affligez que le jour finisse, vous sentez assurément l’amour de votre art, vous êtes heureux, & croyez que vous le seriez souvent bien moins complettement, par cet amour que l’oisiveté rend tyraniquement impérieux ; car vos plaisirs plus durables, sont accompagnés de moins de troubles, sujets à moins de revers, & suivis de moins de regrets.

Il faut plaindre les Artistes qui regardent leurs occupations comme une tâche, comme un asservissement, & qui, lorsqu’ils cessent de peindre, disent en soupirant : « Ah ! je vais donc me reposer & ne rien faire. »

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ANATOMIE, (subst. fém.) Ce qui, dans l’anatomie a plus de rapport à la Peinture, se trouve rédigé & réprésenté dans plusieurs bons ouvrages faits pour l’usage des Artistes. Ils ne sont peut-être pas encore composés comme il seroit bon qu’ils le fussent ; mais ils offrent les bases & les principes nécessaires aux Artistes, & c’est d’après eux & d’après l’étude du naturel, que j’ai donné l’extrait qu’on trouvera au mot Figure.

Je me contenterai de présenter ici sur l’anatomie quelques idées générales que je crois nécessaires, avant de confidérer plus particulièrement les secours dont elle est à la Peinture.

L’anatomie est une science profonde. Elle demande, lorsqu’on veut s’en instruire, qu’on étudie, qu’on observe, qu’on médite dans les plus grands détails tout ce qui compose l’organisation des êtres vivans. Cependant son objet principal est l’organisation de l’homme, comme la plus intéressante, relativement à nous.

L’étude de l’anatomie doit aussi s’étendre sur l’organisation des animaux ; s’occuper, pour s’éclairer davantage, des rapprochemens & des com-