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CONTOUR, CONTOURNER.

Les objets qui tombent sous le sens de la vue ne sont distincts à notre égard que par la couleur que nous fait parvenir la lumière ; mais nous ne distinguerions vaguement que des masses colorées, si chaque objet, doué d’une couleur différente ou différemment nuancée, ne nous offroit une apparence distincte des autres, par les bornes dans lesquelles cette couleur qui lui est propre se trouve renfermée. Ce sont les bornes de ces diverses apparences colorées qui forment le contour ou les contours de chaque objet.

Ainsi, une surface apparente, telle que celle du soleil ou de la lune, dont la matière colorée est comme renfermée dans un cercle, nous donne l’idée d’un objet rond ; & les points ou la ligne supposée qui le circonscrivent, sont pour nous les contours d’un objet rond. Je crois cette première & simple notion d’autant plus suffisante, que dans ce sujet, comme dans une infinité d’autres, les termes reçus, connus & convenus équivalent à une définition.

Il n’y aura personne, à ce que je pense, de ceux qui liront ce Dictionnaire, qui n’ait une idée plus claire encore que mon explication, de ce qu’est un contour : il me sera donc permis de ne pas m’appesantir sur une définition, d’autant qu’il est souvent impossible d’en faire, qui soit complettement juste, & je regarderai mes Lecteurs même les moins instruits en Peinture, comme sachant ce que je veux dire, lorsque j’employerai le terme qui fait le sujet dont je m’occupe. Mais il n’est peut-être pas inutile d’expliquer comment les contours d’une figure ou ceux d’une statue se manifestent à l’œil, relativement au dessin & à la Peinture, de manière à être imités par un trait ; car on peut dire avec raison, qu’il n’y a point, à proprement parler, de trait dans une figure dont toutes les parties sont des suites de superficies plus ou moins rondes & dont les points qui forment la surface se joignent sans interruption. Il sembleroit alors que le trait ou contour que dessine ou que peint l’Artiste fût une sorte de convention de l’Art ; & effectivement lorsque le contour est tracé presqu’également & fortement marqué par un trait de sanguine ou de crayon noir, par exemple, certainement le contour est alors mêlé de vérité & de convention. Aussi le contour le plus parfait est-il celui qui, tracé avec légéreté & avec une intelligence fondée sur la vérité, comme je vais le dire, fait en quelque façon oublier la trace du moyen, pour ne donner à penser que l’image précise du corps qu’on regarde attentivement du point de vue où l’on est placé.

Ce qui donne l’idée du contour dans l’objet narel, sont des nuances plus ou moins obscures qui successivement servent de fond à l’objet qu’on destine, & qui le circonscrivent entièrement. En effet, posez une figure humaine ou


une statue dans un endroit quelconque, placez-vous dans un point d’où vous l’observerez avec l’intention de concevoir ce que je desire vous faire comprendre (je m’adresse, comme on le sent, à ceux qui n’ont aucune idée de ces détails des arts), vous verrez en conduisant votre regard tout autour de l’objet de votre observation, la couleur générale qui le distingue à vos yeux paroître tantôt plus claire, & tantôt plus obscure, parce que si le fond, c’est-à-dire, les couleurs des objets sur lesquelles elles se dessinent à votre œil, se trouvent plus claires ou plus obscures que la sienne ; la dernière ligne de sa surface vous paroîtra tantôt plus claire, tantôt plus obscure elle même par l’effet de l’opposition. Les extrêmités des surfaces de cette figure paroîtront donc terminées ou dessinées par un trait ou contour diversement marqué que vous vous figurerez lui appartenir, quoiqu’il n’appartienne pas plus réellement à cet objet qu’à ceux qui se trouvent derrière ou à côté. C’est-là cependant ce que veut imiter le trait que vous formez avec le crayon ou le pinceau. Si le fond se trouve moins clair que la partie de la figure que vous dessinez, alors le contour que vous attribuez à votre figure semble disparoître ou appartenir au fond. Voilà pourquoi, dans les dessins, il y a telle partie du contour qui n’est décidée que par l’ombre du fond, sans qu’il y ait aucun trait ; ou bien, si l’on n’indique point de fond, l’on rend au moins le trait du contour si léger, si fin, si peu sensible, qu’on désigne à l’imagination ce qu’on n’a pas dû représenter plus sensiblement. Voilà pourquoi, comme je le dirai encore au mot Trait, le contour a d’autant plus de ressemblance avec ce qu’offre la nature, qu’il est moins apparent dans les endroits où la figure s’oppose en clair sur un fond plus obscur ; & le trait qui représente le contour est d’autant plus conventionnel que, sur une surface également blanche, par exemple, il est plus fortement ou plus également marqué & prononcé. Si l’on veut rapprocher plusieurs des notions qu’on trouvera aux mots Académie, Dessin, Trait, Touche, elles s’éclairciront les unes par les autres ; & cela est nécessaire pour avoir une idée juste de ce que c’est réellement que le contour & le trait employés par les Artistes.

Les observations qu’on peut faire avec un Artiste-Destinateur intelligent, en les rapportant à l’explication que je donne, acheveront de la faire comprendre entièrement, s’il reste quelqu’obscurité.

Pour revenir aux deux termes que j’ai rassemblés à la tête de cet Article, je ferai remarquer que le substantif & le verbe offrent entr’eux une différence dans leur signification, ce qui n’est pas sans exemple dans notre langue. Contour signifie, comme je viens de le dire, la ligne tracée qui désigne les formes d’une figure, & c