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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/381

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245 EFF EFF


tions trop dures, les ombres devenues noires, ont rendu, avec le tems, ses tableaux de deux seules couleurs ; le blanc & le noir y dominent, & ces ombres ténébreuses que sa prétention à un certain effet a répandues sur ses ouvrages, ont enveloppé dans leur obscurité les parties excellentes, dont cet habile Artiste devoit tirer sa gloire. Il est donc de justes bornes qui limitent la perfection en tout genre, & les excès sont les ennemis redoutables.

Au reste, un tableau qui offre un effet général, produit sur tout le monde une sensation intéressante, comme une pièce de théâtre intéresse, lorsqu’il y domine une intention marquée, une moralité & un caractère auquel toutes les parties concourent.

Le caractère doit être exprimé par les principaux traits qui le distinguent, par l’art de la disposition des objets, par leur enchainement, leurs rapports & les oppositions qui leur conviennent. Quoique la nature semble autoriser l’excès des détails, cet excès est un obstacle à l’effet théâtral, & à l’effet pittoresque.

Cependant, cette observation n’autorise pas à les soustraire indistinctement, mais à choisir ceux qui sont essentiels ou favorables, pour établir ou rendre plus frappant le caractère qui doit dominer. Se déterminer avec justesse, c’est le propre d’un génie grand, qui dans ce choix, embrasse les details d’un objet, mais qui ne s’arrête qu’à ce qui lui convient. Il ne se laisse point seduire parce qu’il ne perd jamais de vue le but où il tend. Un peintre d’effet, est ordinairement un homme de génie ; & dans tous les arts, le génie, lorsqu’il est supérieur, dévoile la science des effets ; la poésie, ainsi que la peinture, la musique, ainsi que ses deux sœurs, ne pourront jamais prétendre que par cette voye a des succès éclatans & à cette approbation génerale, qui est si flatteuse. Les autres parties auront des administrateurs, les grands effets réuniront tous les suffrages. L’hommage qu’on leur rend est pour ainsi dire, involontaire : il ne doit rien à la réflexion ; c’est un premier mouvement. (Article. de M. WATELET).

EFFET. Les vues ingénieuses que renferme l’article qu’on vient de lire, ont besoin d’être accompagnées de principes plus positifs : ils nous seront fournis par un professeur de l’art.

Quoique les principes des effets soient écrits dans la nature, il faut, pour les y lire & les imiter exactement, faire attention que soit qu’on éclaire une figure du jour naturel, ou d’une lumière artificielle, il doit y avoir un premier clair, qui domine sous les autres. Ce jour principal doit être placé sur la partie la plus propre à le recevoir d’une manière large. Il ne doit point être répété, mais on doit le rappeller sur la figure par de, échos qui empêchent qu’étant seul, il ne produise une crudité désagréable.

La principale lumière étant ainsi bien distribuée, on aura soin de la faire valoir par de grandes parties de demi teintes qui la surpassent en volume. Pour lui donner le dernier piquant, on l’accompagnera de masses d’ombre qui équivalent en étendue & le volume que la lumière occupe, & celui qu’occupent les demi-teintes.

Nous prévenons le lecteur, & sur-tout les artistes que, par masses d’ombre, nous n’entendons pas ici des masses noires, mais de simples privations de lumières, des parties sourdes qui doivent leur vigueur à leur étendue plutôt qu’à leur obscurité. Elles doivent être toujours relatives à la vivacité du jour qui les produit, à la disttance d’où ce jour agit sur elles, & aux reflets qui les environnent. Ainsi les ombres en pleine campagne ou dans les airs sont vagues & légères ; elles sont plus sourdes dans les endroits fermés ; mais elles ne sont noires que dans les caveaux : Les ombres trop obscures rendent l’ouvrage triste, sombre, disgracieux ; les ombres vagues le rendent aimable, vigoureux & vrai. Les masses brunes doivent être d’autant plus vagues qu’elles sont plus larges ; d’où il s’ensuit que plus les masses seront grandes, plus le tableau, sans manquer de vigueur, sera suave & lumineux. Cette proposition qui d’abord paroit tenir du paradoxe, devient une vérité décidée dès qu’on l’approfondit.

Les reflets, nécessaires au parfait arrondissement des corps, seront placés dans les parties tournantes. Comme ils ne sont que la réverbération des rayons de ce qui les environne, ils seront d’autant plus vifs, qu’ils seront produits par une lumiere plus brillante, & se perdront dans l’ombre lorsqu’ils ne seront occasionnés que par une foible lueur : observons que les reflets étant les lumières des parties ombrées, doivent être placés sur le milieu du corps pour en former l’arrondissement, comme on y place les lumières dans les parties éclairées par le jour.

Les lumières, les demi-teintes, ses ombres & les reflets auront leur éclat, leur fraîcheur, leur force & leur beauté relativement au voisinage ou a l’éloignement du principe qui les produit.

Qu’il y air toujours une demi-teinte entre les lumières & les ombres, pour que leur opposition ne produise pas des duretés. Il est néanmoins des occasions où l’ombre peut trancher fièrement sur la lumière ; mais ce n’est guère que lorsque deux corps contigus agissent l’un fur l’autre.

Que les ombres portées soient plus fortes quo celles des objets qui les portent, & que leur force soit altérée des qu’elles recevront quelques reflets ou du sol de la terre ou des corps qui leur sont voisins.

Tous les objets se détacheront de leur fond