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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/537

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gravés en ce genre font infiniment d’honneur à M. Duruifi’eau.

De la gravure à l’imitation du lavis il n’y avoit qu’un pas à faire pour trouver celle à l’imitation des deffins colorés à l’aquarelle ; il i’agiffoit Amplement démultiplier les planches pour une même eftampe , & de diftribuer fur chacune d’elles les couleurs deflinées à en couvrir les différentes places. C’eft ce qui a été fait avec i’uccès par MM. Janinet, Dubucourt & Defcourtis , depuis dix à douze années feulement. Voici le procédé dont on fe fert : on a quatre ou cinq planches de cuivre d’égale grandeur , que l’on a grand foin de faire raccorder exactement les unes avec les autres par le moyen de pointes fixées fur les marges en dehors de la gravure. Sur la première de ces planches on grave fon fujet de manière à trouver les formeirprincipales , & on le termine afl’ez pour qu’il puiffe être imprime dans une couleur foncée , foit de biftre , foit d’encre de la chine médiocrement noire. L’épreuve de cette première planche fait à-peu-près l’effet d’un deffin lavé auquel il ne manqueroit que l«s couleurs. Les autres cuivres font deftinés à recevoir ces couleurs , 8c à les tranfmettre à l’épreuve par le moyen de l’impreflion ; ainii la deuxième planche eft deliinée à recevoir les travaux qui doivent être imprimés en rouge. La troifième planche le fera aux travaux imprimés en bleu. La quatrième fera pour l’impreffion de couleur jaune. Le mélange des couches de bleu 8c de jaune donnera le verd ; le mélange du rouge avec le jaune iera une teinte qui participera des deux , & ainfi des autres. La première planche, celle deftinée au fond 8c au fujet principal , étant imprimée* en noir ou en biftre, donnera les teintes grifes, noires ou biftrées , & le fond du papier, laiffé blanc, donnera les lumières pures. L’heureux accord de ces couleurs, leur mélange harmonieux a quelquefois produit des eftampes fort agréables ; mais , abftraclion faite du talent en gravure 8c en deffin , la grande difficulté de cette forte de gravure confiftant dans la juftefle des rentrées de chaque teinte, il faut convenir qu’à l’exception de quelques eftampes gravées par les artiftes que nous avons nommés , & par un petit nombre d’autres ; la plupart de celles de ce genre font au-deffous du médiocre. Nous ne diffimulons pas que cela vient autant de la difficulté de les bien imprimer , que -de celle de bien diftribuer fes teintes fur fes differens cuivres -, car s’il faut que le graveur ait des connoiffances relatives au coloris , il faut suffi qu’il foit aidé par un imprimeur intelligent, & homme de goût. La réunion de ces qualités dans deux perlbnnes d’un talent différent ne peut être commune ; auffi yoy.ons-nous qu’il y a bien peu de yra»-GRA

ment belles eftampes imprimées <y couleurs. Quel feroit donc l’orgueil de la gravure fi elle pouvoit, à tous fes avantages, joindre encore ceux du coloris ? Nous ibmmes bien éloignés de décourager les graveurs des louables efforts qu’ils font pour y réuffir ; mais nous croyons que la gravure a. fait aflez pour fa gloire & pour fon utilité entre les mains des Audran , des F.delinck, des Drevets , fans prétendre vainement aux effets brillans & hardis du pinceau , & à l’harmonie des couleurs.

La gravure en manière noire, celle à l’imitation du lavis, & celle en couleurs à l’aquarelle , ont toutes trois le même défaut par elles-mêmes , celui d’être de peu de durée , & de s’ufer promptement à l’impreflion. On ne peut en tirer qu’un petit nombre de bonnes épreuves, à caufe du peu de folidité des travaux faits fur le cuivre. Comme ils n’en effleurent , pour ainli dire T que la furface , ils font bientôt affoiblis par la main de l’imprimeur 8c par l’impreflion fur le papier. Il eft vrai qu’on peut les retoucher facilement ; mais les épreuves faites après les retouches font ordinairement inférieures aux premières. Les gravures au burin , i ou à l’eau - forte retouchée au burin , n’ont pas ce défaut , par la raifon oppofee. On peut, quand le cuivre eft de bonne qualité , tirer de celles-ci un grand nombre de bonnes épreuves ; au refte tous ces avantages & ces défavantages font compenfes parle plus ou moins de temps qu’on met à graver dans une manière ou dans une autre ; une gravure en manière noire ou au lavis n’exige pas le quart du temps qu’il faut employer pour une gravure au burin de pareille grandeur-, c’eft peut-être même cette célérité dans l’exécution &refpérance déplaire & de féduire par les couleurs, qui ont engagé tant de jeunes élèves à s’adonner à la gravure à l’aquarelle -, c’eft à cela fans doute que nous devons une infinité de médiocres eftampes, qui n’ont fait aucun honneur à leurs auteurs. La gravure en bois a été pratiquée avant la gravure en taille -douce. « L’opinion la plus » générale , dit M. Hubert eft qu’elle tire fon » origine des carriers j ou faifeurs de cartes à » jouer, nommés en Allemand formfchneiêer » ( tailleurs de formes ou de moules) parce que » le méchanifme en eft à - peu -près le même » fur- tout par rapport aux cartes allemandes. Il » réfulte des recherches de nos favans que les » cartes éto’ent en ufage en Allemagne dès » l’année i ?oo.

ii L’impreflion des images étoit anciennement » la même que celle des cartes. Après avoir » chargé de noir la planche de bois , ou le » moule, on y appliquait une feuille de papier humeété ; enfuite on paffbit plufieurs » fois fur cette feuille un frottoir de crin ou » de bande d’étoffe , & l’on frottoit ce papier