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Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/656

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M O D quoi, auroit dû plutôt nous laisser sa chaleur, sa pratique, sa hardiesse étonnante à travailler le marbre ; que cette route particulière & nouvelle qul l’on prétend qu’il fraya, & qui cependant n’a pas empêché ce grand sculpteur d’estropier savamment plus d’une figure de marbre. »

Ce que M. Falconet avance ici est prouvé par quelques ouvrages que Michel-Ange a laissé imparfaits, & qu’il n’auroit pu terminer, parce que dans l’impétuosité de son travail, il avoit trop entamé le bloc.

Mais quand il seroit vrai qu’aucun statuaire moderne n’eût la hardiesse & la liberté des artistes de l’ancienne Grèce, & de Michel-Ange, il ne faudroit pas attribuer leur timidité au procédé qu’ils suivent en travaillant le marbre d’après le modèle, puisque rien ne leur défend, quand ils ont reçu leur bloc dégrossi par la main d’un ouvrier, de travailler avec une liberté de maîtres.

Il faut avouer que nous avons eu des artistes très-habiles à faire de beaux modèles, qui ont dû à cette habileté une grande réputation, & qui avoient très-peu d’habitude de travailler le marbre. Après avoir fait dégrossir le bloc par un ouvrier subalterne, ils étoient obligés d’avoir recours, pour avancer le travail, & l’approcher autant qu’il étoit possible du modèle, d’employer des artistes fort habiles, non pas peut-être dans l’art de créer, mais dans celui de copier très-exactement en marbre. Eux-mêmes recevant enfin l’ouvrage à très-peu près terminé, ne faisoient qu’y donner timidement quelques petits coups d’outils ; ils le frottorent & le caressoient plutôt qu’ils ne le travailloient.

Mais on ne sauroit dire en général que leur procedé fût celui des modernes. Je ne me rappelle plus quel sculpteur appelloit ces artistes trop peu ouvriers, des potiers de terre. Ils se vengoient en traitant de marbriers les artistes savans à travailler le marbre, mais moins heureux à composer de belles statues. Malgré ces reproches mutuels, il est aisé de sentir qu’il doit résulter pour l’art un grand avantage de la réunion des deux talens. L’ouvrage joint alors, à la beauté des formes & des proportions, une hardiesse de touche, un feu d’exécution qu’il ne peut recevoir que de la main du maître. C’est là peut-être ce que vouloit dire M. de Jaucourt, & ce qu’il n’a pas dit.

Mais si ces deux qualités ne peuvent être constamment réunies, il faut avouer que l’artiste qui fait faire de très-beaux modèles, trouvera toujours des ouvriers capables de les rendre en marbre peut-être avec un peu de froideur d’exécution, mais avec la précision la plus exacte, & qu’il est bien préférable au sculpteur qui sait très-bien tailler le marbre, mais qui ne sait modèler que des ouvrages médiocres. On sait que le Bernin & notre Bouchardon faisoient considérablement avancer le marbre d’après leurs modèles. C’étoit peut-être moins l’habileté du métier qui leur manquoit, que la patience de faire une seconde fois, sur une matière résistante, ce qu’ils avoient déjà fait si bien avec une substance plus docile. Nous ne prétendons par les louer ici d’avoir négligé la manœuvre de leur art ; mais nous n’oserions non plus les condamner. Pendan, que d’habiles ouvriers traduisoient en marbre les beaux modèles de Bouchardon, il en composoit de nouveaux, ou il consacroit ses laborieux loisirs à faire ces dessins si savans & si purs, que les amateurs recherchent avec tant d’avidité.

Quoique souvent, comme on l’a dit, un savant maître ajoute sur le marbre des perfections nouvelles à son ouvrage, cependant les beautés d’une excellente statue en marbre, & celles d’une excellente modèle peuvent se balancer, parce qu’elles ne sont pas toutes du même genre. Celles qui tiennent aux formes & aux proportions sont les mêmes ; celles qui tiennent à l’exécution sont différentes. Le modèle étant fait d’une matière flexible, ses beautés respirent la facilité, le goût & même le ragoût : on aime à sentir & à suivre les traces variées du doigt qui s’est promené sur tout l’ouvrage ; on aime à reconnoître ces coups d’ébauchoir, tantot badins, qui donnent ici le feu & la vivacité à un œil, l’esprit à une bouche, le sentiment à une narine, là une aimable légèreté à une linge flottant, à une boucle do cheveux. Le travail du marbre est plus difficile, & par conséquent : plus austère ; il est moins susceptible d’esprit, mais il est capable de fierté ; il se refuse au badinage de la main, mais l’empreinte du sentiment y est plus profonde ; on reconnoît en général qu’il a coué davantage, mais on jout de l’habileté de l’artiste par-tout où l’on ne peut s’appercevoir qu’il lui ait couté. Souvent la statue étonne plus, & le modèle se fait plus aimer : souvent aussi l’œil avide, & incertain se porte de l’un à l’autre, & n’ose dicter à l’esprit aucun jugement. Il faut avouer cependant qu’en général, sans parler de ce qui tient à l’art, l’éclat doux & tranquille du marbre lui obtient la préférence. (Article de M. Levesque.)

MODELER (Verbe act.) faire un modèle. Le fait on en terre ? on se sert d’une argille bien lavée, bien nétoyée, bien pétrie. Fn l’employant, on la pétit encore une fois dans les mains, on donne aux différens : morceaux qu’on en prend la forme grossière de qu’ils doivent représenter, & on acheve de perfectionner cette forme avec les doigts, surtout avec le pouce,

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