Aller au contenu

Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/673

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Sio

M Y T siége dans le nez & s’exprime par le gonflement des narines : le dédain est manifeste par l’élevation de la levre inférieure.

Lucien, dans son Anacharsis, nous décrit une statue d’Apollon Lycien. Le Dieu est penché en arriere, tenant de la main gauche son arc, & ayant la droite posée sur sa tête pour montrer qu’il se repose de ses fatigues.

L’Apollon Musagete ou conducteur des Muses, tableau conservé dans le cabinet d’Herculanum, est dans la même position : mais il n’a point d’arc : les armes ne conviennent pas au Dieu protecteur des arts paisibles : il tient dans sa main gauche une lyre à onze cordes ; sa tête est couronnée de laurier, une branche de laurier est à sa droite. Comme il n’est ni chasseur ni guerrier, il est couvert d’une simple draperie dont un bout lui pend sur l’épaule droite & tombe jusques sur les muscles pectoraux. Elle passe sur l’épaule gauche sans la couvrir entièrement, tombe le long du dos, vient envelopper les cuisses & se termine au dessus de la sandale. Le Dieu est enfin sur un trône dont le siége est fort bas, & dont le dossier s’éleve jusqu’aux épaules de la figure. Elle est élégante, svelte, la tête paroît reunir la douceur à la majesté : je dis qu’elle paroît, car il faudroit avoir vu le tableau original pour oser porter un jugement certain sur sa beauté.

« Le vêtement d’Apollon est d’or, dit Callimaque ainsi que son agrafe, sa lyre, ses flêches, son carquois ; la chaussure même est d’or : l’or convient à la richesse de ce Dieu. »

Cette idée du poëte n’est pas à négliger par le peintre. L’or peut être prodigué dans la représentation de ce Dieu, sur tout quand il est le symbole du soleil, parce que la couleur éclatante du plus précieux des métaux a beaucoup de ressemblance avec celle de l’astre du jour. Aussi les maîtres de l’art hermétique ontils désigné l’or par le nom du soleil.

Mais quand Apollon est le conducteur des Muses, & le dieu de la poésie, moins de richesse convient à sa parure : il suffit que sa lyre soit d’or. On vient de voir qu’il n’a qu’une simple draperie verte dans le tableau antique d’Apollon Musagete. L’artiste a peut-être préféré cette couleur, parce qu’elle est celle du laurier.

Moins d’opulence doit se remarquer dans le vêtement d’Apollon pasteur. L’expression de ce dieu ne doit pas être celle de l’Apollon vengeur qui se voit au Belvedere : son caractère est la bienfaisance & la bonté. Telle est la tête de l’Apollon de la Villa-Ludovisi, la plus belle, dit Winckelmann, après celle du Belvedere, quoique d’ailleurs la figure soit assez peu remarquée. Contre la pierre sur laquelle il est assis, est une houlette recourbée. On remarque, dans quatre têtes d’Apollon, que


les cheveux sont relevés & attachés avec ceux du sommet, sans laisser paroître la bandelette qui les retient : c’étoit la coëffure des adolescens, & celle, à ce que suppose Winckelmann, que les Grecs appelloient Crôbylos, & qu’il croit répondre au Corymbos des jeunes filles qui désignoit des cheveux attachés sur le sommet de la tête. Il ajoute que les écrivains ne donnent du Crôbylos qu’une notion confuse ; il avoit négligé sans doute de consulter Suidas : il y auroit : trouvé celle qu’il donne lui-même ; il y auroit lu que le Crobylos étoit pour les hommes, ce que le Corymbos étoit pour les femmes. Au reste, les artistes ne doivent pas négliger la remarque qu’il fait, que toutes les têtes de Diane, & toutes celles des vierges sont coëffées à la manière nommée Corymbos.

Dans quelques statues d’Apollon, ce dieu a beaucoup de ressemblance avec Bacchus. Tel est l’Apollon du Capitule, nonchalamment appuyé contre un arbre, & ayant un cygne à ses pieds. Telles sont encore trois autres figures de la Villa-Médicis.

Apollon & Bacchus, seuls de toutes les divinités, portent des cheveux qui descendent le long des épaules, & ce caractère les fait reconnoître dans des statues mutilées : on le retrouve dans le tableau de l’Apollon Musagete ; enfin l’Apollon pasteur doit seul avoir les cheveux relevés.

BACCHUS, toujours beau, toujours jeune, comme le dit Ovide :

Tibi enim inconsumpta juventa est ;
Tu puer ætrnus, tu formosissimus alto
Conspiceris cœlo.

Il tenoit de la nature des deux sexes, comme le dit Orphée dans l’hymne à Bacchus ; c’est encore Bacchus qu’il célèbre dans l’hymne à Misé, où il l’appelle mâle & femelle, Iacchus à double nature. Euripide lui donne des traits de femme. C’est donc avec raison que Winckelmann dit que sa jeunesse idéale est composée des traits qui conviennent aux deux sexes & semble avoir été empruntée de la nature des Eunuques ; il auroit peut-être mieux dit qu’elle étoit empruntée de l’idée que les anciens se formoient des Hermaphrodites.

« Dans les plus belles figures de l’antiquité, vous voyez toujours, dit-il, ce dieu avec des membres délicats & arrondis ; & des hanches saillantes & charnues, comme celles des femmes, parce que Bacchus, suivant la fable, a été élevé en fille. Pline fait mention de la statue d’un satyre qui tenoit une figure de Bacchus vêtue en Vénus, & Séneque nous le décrit comme une vierge