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N U Y de la grossièreté qui choque ou qui dégoute.

Voilà une de ces différences remarquables qui existent entre les productions permanentes des arts, & entre les productions passageres de la société.

Je joins dans cet article au mot nudité, celui de nud ; mais ce dernier appartient plus particulièrement au langage de l’art. On dit cet artiste ne cannoît pas assez le nud. Sous cette draperie on n’entrevoit pas, on ne sent pas assez le nud.

Ces manières de s’exprimer ont rapport à la correction du dessin. Un artiste peu exercé à dessiner la figure, ne représente que des figures vêtues ; mais à travers les draperies de ses personnages perce son ignorance.

Les vêtemens en effet ne reçoivent leurs principales formes que de celles des parties du corps qu’ils couvrent, de leurs proportions, des os & des jointures. Voilà ce qui décide les plans, les effets, les plis des étoffes ; & le mannequin, (comme je l’ai dit) non-seulement ne supplée pas à la Nature, mais trompe & égare le plus souvent l’artiste.

L’étude du nud (c’est aux jeunes artistes surtout que je m’adresse) est indispensable. Cette étude, lorsque vous la faites d’après les femme, est non-seulement très-difficile, mais elle n’est pas sans danger pour les mœurs ; & les mœurs influent beaucoup sur le talent.

Je n’ai pas intention d’affecter une sévérité pédantesque qui me blesseroit dans les autres, & qui seroit incompatible avec la pratique & avec quelques-unes des idées nécessaires à vos arts ; mais je m’en rapporte à votre propre expérience, & je vous laisse convenir intérieurement, & seul à seul avec vous-mêmes, de ce que je m’abstiens de dire ici.

Si vous voulez au reste, un préservatif moral, le voici : lorsque vous n’êtes pas enflammés de cet amour pur & absolument libéral de votre art ; craignez, ou ne vous exposez pas.

Mais pour revenir au nud, regardé uniquement du côté de l’art, ne peignez jamais une figure drapée sans l’avoir dessinée nue. Cette sujetion est grande ; mais elle est indispensable & aussi essentielle que de bien connoître la charpente d’une maison, avant de la vouloir couvrir.

Le nud dessiné & observé décidera naturellement les masses, les plis & les effets de votre clair-obscur, que sans cela, vous chercherez en tâtonnant. Par cette exactitude à dessiner sans cesse d’après le nud, vous ne ferez pas disparoître les formes des parties, leurs proportions & leurs emboîtement.

Combien il est facile à des yeux instruits de discerner dans vos ouvrages une figure drapée de pratique, sans que vous l’ayez dessinée auparavant d’après la Nature.


Quand a ce qu’on appelle proprement des nudités, ce qui entraîne toujours le sens d’obscénités : ne vous prêtez pas aux desirs que des mœurs corrompues inspirent trop souvent aux jeunes gens égarés, aux vieillards blasés, ou à des hommes d’un rang ou d’une richesse qui semblent donner le droit de n’avoir aucune mesure. Il doit vous suffire, pour résister aux empressemens qu’on pourroit vous témoigner, aux ordres même que vous pourriez recevoir, de penser que vous n’oseriez écrire votre nom sur votre ouvrage. (Article de M. Watelet.)

NUIT, (subst. fém,) Ce mot n’est pas plus un terme de peinture que le mot jour ou le mot aurore. Cependant cet instant où la lumière de la lune, ou bien celle du feu & des flambeaux éclairent les objets, donne lieu à des effets si pittoresques, & si neufs, oblige à des études si difficiles, si particulières & si intéressantes, que nous croyons devoir en parler ici.

La nuit, ou plutôt les diverses lumières qui l’éclairent, offrent de brillantes occasions d’employer ce que les couleurs ont de plus puissant, & ce que l’art du clair-obscur peut produire de plus séduisant. Mais sans études assez constantes, sans observations bien précises, il seroit aisé de se tromper dans l’exécution des sujets de nuit..

Nous n’entrerons pas ici dans tous les détails, dont les effets de la lune & des lumières artificielles sont susceptibles. Nous ne voulons pas dicter les teintes que ces divers corps lumineux répandent au milieu des ombres de la nuit. Il nous suffira d’établir que ces teintes sont variées, & suivent la couleur des lumières dont elles émanent : la nouvelle lune, par exemple : étant à l’horison, colore les objets d’un ton doré, cette teinte devient argentine & vive quand l’astre de la nuit est au Nadir, & que le temps est serein.

Heureux l’artiste qui, bien instruit de la marche des rayons de la lune, & de ses couleurs, rencontre l’occasion de la faire contraster sur la même toile, avec les effets d’une incendie, ou ceux d’un volcan dont l’explosion répand au loin les feux, & les pierres en fusion : s’il a bien comparé les forces diverses de ces dernières lumières, avec celle de la lune, il aura reconnu que celle-ci l’emporte toujours en éclat, quelque brillantes que soient les flammes que vomit la terre : un rouge jaunâtre très-clair, est la couleur de ces flammes dans le foyer de leur plus forte lumière ; l’autre au contraire présente a ses copistes une couleur bleuâtre, de la teinte la plus fraîche & la plus vive.

Si l’on considère pendant le jour la lumière d’une lampe, elle n’offre qu’une teinte rouge :