Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T01.djvu/728

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PAN il se frappe le front : d’une idée difficile à trouver ; il se frotte les mains, il frappe sur sa table. Dans toutes ces expressions, la gaité anime le visage ; la tête a l’élévation de l’orgueil.

Un sentiment contraire à celui de l’orgueil est la vénération. Dans la présence de l’objet qui l’inspire, non seulement les muscles des sourcils, de la bouche & des joues deviennent moins fermes & s’affaissent ; mais il en est de même de tout le corps ; sur-tout de la tête, des bras & des genoux. Lorsque les Orientaux croisent leurs bras sur la poitrine, tandis qu’ils inclinent le corps, sans doute leur intention est d’indiquer, par ce geste du recueillement, la profondeur du sentiment dont ils sont affectés : en serrant fortement les bras contre le corps, ils veulent désigner la crainte qui, de même que la honte, touche de bien près à la vénération. La raison en est facile à deviner : car si l’on compare une force étrangère avec sa propre foiblesse, on doit éprouver de la crainte, & l’on ne peut le défendre d’un sentiment de honte, quand on compare ses imperfections aux qualités d’un être plus parfait.

Par l’effet de ces deux sentimens, celui qui révere doit tendre à se tenir loin de l’objet révéré : l’homme rempli de vénération se croit indigne de tout commerce intime avec l’être supérieur qui lui en impose ; il s’en tient à une certaine distance, & cet espace devient le symbole phisique de la différence morale qu’il met entre lui & la personne qu’il respecte. L’homme orgueilleux au contraire s’approche de ceux qui l’environnent au point de les gêner, de les froisser, de les heurter.

Dan, l’amour, la tête est languissamment penchée d’un côté, les paupières se rapprochent plus qu’à l’ordinaire, l’œil est dirigé vers l’objet seulement avec douceur ; la bouche est entrouverte, la respiration lente, & de temps en temps coupée par un profond soupir ; tout le corps est replié sur lui-même, les bras tombent négligemment le long du corps. Ces symptomes, accompagnées d’une expression de langueur & de défaillance, sont plus ou moins marqués suivant que la passion est plus ou moins vive.

Le but de cette passion est l’union des deux amans. L’amant timide se contente de tendre à cette union en touchant d’une main tremblante le vêtement de l’objet aimé. Plus hardi, il ose lui toucher un doigt, lui prendre la main l’embrasser, l’entrelacer dans ses bras, la presser contre son cœur reposer sa tête sur sur son sein.

Le jeu du mépris est la bouffissure de l’orgueil ; mais, dans ce dernier sentiment ; celui qui l’éprouve est plus occupé de ses propres perfections, & dans le premier des imper-


fections d’autrui. Les marques du mépris sont de détourner le corps & de se présenter de côté, de lancer d’un air fier un regard rapide & quelquefois aussi jetté négligemment par dessus l’épaule, comme si l’objet n’étoit pas digne d’un éxamen plus attentif & plus sérieux. Il arrive souvent qu’ou y associe l’expression du dégoût par le nez froncé & la levre supérieure un peu élevée. Quand celui qu’on méprise paroît avoir une idée trop avantageuse de lui-même, & vouloir opposer la fierté au dédain, l’œil le mesure alors d’un air railleur, tandis que la tête se penche un peu de côté, comme si, de sa hauteur, on avoit de la peine à appercevoir toute la petitesse de cet homme : les épaules s’élevent ; un ris dédaigneux & mêlé de pitié annonce le contraste que l’on remarque entre la grandeur imaginaire de l’objet méprisé & sa petitesse réelle.

Le jeu de la honte varie suivant les circonstances. Quelquefois la honte arrête sur la place, quelquefois elle fait prendre la fuite. Quelquefois celui que l’on couvre de honte cherche à détruire par sa présence & par une feinte fierté l’opinion désavantageuse qu’on a conçue de lui. Tantôt il accompagne de mouvemens gauches & confus ses excuses balbutiées : tantôt par une attitude roide & immobile, accompagnée d’un silence morne & d’un découragement complet, il avoue son impuissance à se soustraire à l’affront mérité La honte rend quelquefois absolument immobile : on baisse les yeux, on plie, on chiffonne quelque partie de son vêtement ; on se tourne de côté, pour être plus certain de ne pas rencontrer les yeux de celui dont on fuit les regards, & le menton se colle sur la poitrine.

La souffrance est une affection inquiete & active qui se manifeste par la tension des muscles ; c’est une lutte intérieure de l’ame contre une sensation douloureuse ; C’est un effort pour s’en débarasser & la surmonter. L’abbattement ou la mélancolie est au contraire une affection foible & passive ; c’est un relâchement total des forces, une résignation muette & tranquille, sans résistance ni contre la cause, ni même contre le sentiment du mal. Ou la cause du mal est supérieure à nous, ou elle ne peut plus être repoussée : ainsi nous ne voulons, ou pour mieux dire, nous ne pouvons penser à la vengeance. Le sentiment du mal a déja lassé notre résistance, épuisé nos forces ; par conséquent il a déja perdu de sa violence. Le premier sentiment de Niobé privée de ses enfans, fut l’étourdissement ; le second, la fureur de la douleur portée au suprême dégré ; le troisiéme seulement fut l’abbattement ou la mélancolie ; car les Dieux, émus de pitié, ne la changèrent en rocher qu’après qu’elle fut de retour dans sa patrie. Les Poëtes, par cette

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