Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/165

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■Plîne accorde aux efrets des anciens, avoir mis ic3 modernes "dans la pofiibilité de les furpafler dans la (cience du clair-oblcur , 8c dans l’art de rendre avee vigueur Se avec éclat les effet.’ ; divers de ia lumière & des ombres. Pour juser à qui appartiendroit la prééminence dans }es grandes compcfuions & dans les effets, il faudroit voir un de ces beaux tableaux grecgf où l’iiiufion etoit fi forte, au rapport des hiftoriens de l’art. Mais leurs pompeuies defcriptions ne fatisfont pas les aitiftes, tant elles leur paroiiTent pleines de contradiclions 8c d’exagérations. L’ouvrage de M. Falccnet, le itiilpieur , eft un recueil complet de toutes les dilcuffions dont cette partie de listérature plttorelque eft furcepdble. Nous ne pouvons faire m.eux que d’y renvoyer nos. leiteurs. Sans nous airêter à Iz peinture des Chinois, qui cependant montrent par fois de l’élégance dans leurs draperies & dans leurs attitudes, mais qui font d’ailleurs fi ridicules dans les autres parties de l’art ; fans parler auffi des peintures à frefque tk gothiques qui ont préparé le règne des peintres célèbres de l’Italie, paflons à ce liècle fameux qxii a produit les plus favantes & les plus fortes peintures, depuis la divilion de l’empire romain julqu’à nos jours.

"Leurs auteurs ont paru fous les papes Léon X & Jules II, fous les Médicis Se Ions le règne de François l". Leurs ouvrages encore fubfiltans à Rome, à Florence, à Mantoue, à Trévife, à Padout , à Venife, à Anver.< ! Se à Fontainebleau , leurs ouvrages, dis-je, quoique très-yariés entr’eux , montrent de la pureté , de la chaleur, du grand , de l’énergie, ou la plus forte & la plus puiflante couleur. Nuls hommes depuis n’ont été comparables à ces auteurs, fi ce n’eft en France, où l’art de peindre, engourdi fous les règnes des derniers Valois, ne fe foutenoit que fur les vitraux de Jean Coufin & de les élèves. Louis XIII qui , dSt-on , a connu le plaifir d’exercer li peinture, la ranima en France. Le cardinal - minifl’re , génie fait pour en fentir le prix , y favorifa la renaiffance : elle parvint bientôt à fon plus Tiaut période par les ouvrages de Pouflin , de Vouer, de le Brun , de le Sueur , de la Hire , de Champagne , enfin de tous les grands hommes qui contribuèrent , dans leur art, à cette fplendeur univerfelle du fiècle de Louis le Grand.

Chofe étonnante ; Les premiers maîtres des grandes écoles de peinture , ifolés chacun dans Jeur patrie, atteignirent, comme nous venons de le dire , au plus haut degré d’excellence dans toutes les parties de l’art^ & ils n’eurent pour guides que l’antique & la nature, & pour Ibutien que leur propre génie. Ceux qui les Suivirent ; raiTemblés, & qui av.oient les exem-P E I

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pies de leurs prédéceffeurs à ajouter aux premières fources du beau & du vrai , ne parvinrent cependant pas à leur perfeélion. Les Carrachcs 8c leur école, Paul Véronefo 5 : tous les peintres de Ion tcms , Van-Dyck & tous ceux qui exerçoient l’art en Italie, en Flandre 8c en France, foutinrent fans doute encore la peinture avec éclat. Mais bientôt après , le nombre des artiftes fe multiplia , & fuivant en efclaves ces hommes du fécond ordre , ils ne produifircnt que des ouvrages d’un degré inférieur. Les uns vroulant être colorilles, furent exagérés ; les autres eurent de la pureté ; mais ils furent froids & infipides. Quelques efprits adroits & avides de renommée voulurent faillir fur cette troupe uniforme ; ils ne visèrent pas à reprendre la route de la vérité & du fimpie , fi bien tracée par les premiers maîtres ; ils prétendirent à un genre de beauté conventionnelle Se extraordinaire , à un ftylé de fafte & d’apparat , enfin à un mérite d’a^ drefTe dans le maniement du pinceau ; tout cela fut appelle le goût : & c’eft ainfi que la peinture alla en dégradant. Citeral-je les formes affeftées des Cortone & de les élèves , les attitudes bizarres & les effets tranchans de Tîepolo & de Piazetta, enfin les ingénieufes conventions des derniers maîtres de notre école > Non, il n’efl perfonne qui ne fente que les tableaux de ces tems n’ofrroient que de faufles beautés & des talens de parade. On voit aufli que partout où cette pente au mauvais flylç aura été fuivie, la peinture y eft anéantie. En France, un amateur éclairé des chefsd’œuvre de l’antiquité (i) , élève de Bouchardon , & qui , par fon rang & fa fortune , avoir quelques moyens d’encourager l’imitation de l’antique & des maîtres du quinzième fiècle , a formé le hardi projet de ramener le bon goût. Il a été fécondé par les talens d’un artifte (x) à qui il ne falloir que l’occafion de le répandre par fes leçons & par fes exemple*i ainfi a commencé cette révolution d’autant plus étonnante , qu’il eft prefqu’inoui qu’on ait vu une nation remonter d’un go-rit fadice & éblouiffant, à un fyftême de beautés fimples & févères. L’hiftoire de tous les peuples montre , au contraire, des commencemens barbares , des perfeiElions , & enfuite la décadence, d’où ils ne reviennent plus. Les François feroient-ils donc les feuls capables d’un tel retour vers la fource du vrai beau f Cette marche eft déjà dignement commencée ; on ea verra fans doute les «neillcures fuites , fi les événemens publics n’y portent aucun obftacle : car j’écris en 1789 , au milieu de circonftances inquiétantes pour les arts.

(J) Le comte de CayJus.

(ï) M. VJen.

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