Page:Encyclopédie méthodique - Beaux-Arts, T02.djvu/345

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
SCU SCU 335


de ce Prince. Je crois que la plupart des chefs-d’œuvre faits du temps de Trajan & d’Adrien ont été exécutés par des Grecs. On y reconnoît leur goût, & dans leurs défauts même, les auteurs de ces ouvrages semblent nous retracer le style des anciens, tant par la simplicité des contours, que par l’accord des proportions & les beaux caractères de têtes.

Les Siciliens ont eu quelque chose du bon goût des Grecs, & l’ont même assez long-temps conservé, sans être néanmoins parvenus au même degré de perfection : car ils furent moins corrects, plus roides, plus chargés, & n’ont pas su donner au marbre la même élegance ni la même morbidezze.

On peut reprocher une erreur aux antiquaires : c’est d’avoir voulu chercher la perfection dans des choses qui n’en sont susceptibles qu’à certains égards ; par exemple, dans les pierres gravées, où il ne faut pas chercher la haute perfection des formes, mais seulement celle du style. On n’a pu se proposer en effet que d’y rendre les choses les plus faciles, en évitant celles qui offroient trop de difficulté dans de si petites proportions, & en omettant tous les détails qui auroient pu embarrasser l’artiste.

On remarque les qualités dont ce genre est susceptible, celles du style, dans les ouvrages qu’on a trouvés en pâte antique, & qui avoient apparemment mérité l’estime des anciens même, puisqu’ils en avoient fait multiplier les empreintes. On y reconnoît qu’ils ont fait consister la beauté dans une belle & noble simplicité. On peut croire que l’art ne s’est dégradé que par le trop grand nombre des artistes, & que, devenu trop commun, il cessa d’inspirer la même estime. Lorsque la Grèce fut tombée sous la domination de Rome, dans le temps de la plus grande splendeur de cette république, temps où l’on ne considéroit que les gens de guerre, les artistes privés de l’espérance de s’attirer de la considération, tombèrent dans le découragement : dès lors il renoncèrent à l’étude de l’art, qui devint une sorte de métier, & qui fut enfin plongé dans un abandon total. Comme rien ne peut demeurer à un degré fixe, l’art ne faisant plus de progrès déchut rapidement ; s’il se releva quelque temps sous des princes qui l’aimoient, les révolutions de l’empire, les guerres successlves, le changement de religion, l’abolition des images, l’invasion des barbares portèrent les derniers coups au bon goût, en détruisant ce qui restoit encore des chefs-d’œuvre des anciens.

Les beautés & les règles de la proportion paroîssent avoir été découvertes par les Grecs & par les Etrusques. Ils reconnurent deux forces dans les principales parties, l’une par laquelle elles agissent, l’autre par laquelle elles sont soutenues ; la première exige de la iVcitesse & de la légèreté, la seconde de la puissance & de la folidité. La découverte des proportions doit appartenir au premier style de l’antiquité.

Dans le second style, les anciens conservèrent toutes les proportions de longueur qu’ils avoient établies dans le temps de leur premier style ; mais y ayant reconnu de la roideur & de la secheresse, il en changèrent le contour en pinçant moins la partie étroite des articulations, ce qui donna plus de grandiosité à leurs ouvrages ; mais ils devinrent plus lourds, parce qu’ils n’avoient pas encore su trouver la ligne serpentine & ondoyante

Ils commencèrent à faire un plus grand usage des lignes convexes, & par elles, ils donnèrent encore un plus grand caractère à leurs figures. Ils ne les employèrent que pour les grandes parties. Les ouvrages qui paroissent appartenir à ce temps, semblent étranglés dans leurs inflexions. Ils combinoient les lignes convexes avec les lignes droites : les droites servoient pour les parties saillantes, & les convexes pour les inflexions ; c’est-à-dire qu’à l’endroit de la plus forte rentrée, ils mettoient une ligne courbe plus rapide, & qu’à l’endroit où ils vouloient beaucoup sortir, ils allongeoient beaucoup la ligne droite.

Cette méthode tient de leur premier style. On le remarqua dans le caractère de leurs têtes où l’on ne voit qu’une seule ligne saillante depuis la naissance des cheveux jusqu’à la pointe du nés ; & cette ligne est droite. Ils observèrent d’abaisser les petites parties & de donner de l’élévation aux grandes : ils portèrent la plus grande attention sur les formes générales. On voit dans leurs têtes de Jupiter, de la Minerva Médica du Palais Jiustiniani, & de leurs autres statues, qu’ils ont beaucoup employé les lignes droites & les angles, & qu’ils ont exécuté avec grand soin les parties principales en négligeant les moindres. Ils ont fait le front plat, &, depuis la naissance des cheveux jusqu’au bout du nés il n’y a qu’une ligne droite, terminée par un méplat qui forme la pointe du nés, & ensuite un angle droit va se terminer à sa racine. La partie supérieure du nés est plate, les deux côtés le sont également, & les narines l’ont à peine marquée ; parce qu’on ne vouloir pas interrompre la forme principale du nés, qui, va de côté, offre un triangle & dont la surface est une forme plate.

Depuis la racine du nés jusqu’à la partie la plus avancée de la lèvre supérieure, ils formèrent un méplat à-peu-près égal en longueur à celui