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Page:Encyclopédie méthodique - Géographie ancienne - Tome 2.djvu/16

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8 GRÆ GRÆ

Les dialectes grecs eurent un avantage qui assura ’ la durée de leur langue. Aucune de ces dialectes ne sur sacrifiée à l’autre ; maniées par les écrivains les plus distingués, régnant avec égalité dans lès assemblées générales de la Grèce, dans ces jeux où tous les Grecs étoient réunis, aucune ne pouvoit l’emporter sur Tauire ; les orateurs & les écrivains dévoient les posséder (k ne leur accorder aucune préférence. Le génie de ceux qui se servirent de cette langue Ja porta de bonne heure à un degré de perfection, dont aucune des langues modernes ne peur se flatter d’approcher. Elle avoit, dit M. Tabbé Arnaud ( Mém. de Huerai. ), une expression & un chant que nous ne^retrouvons que dans’notre musique, & qui faisoit essentiellement partie du langage. U n’y avoit point de syllabe qui n’eût ses sons, ainsi que ses temps propres ; & Tan de la poésie & de la musique consistoit uniquement à prescrire à ces temps & à ces sons inhèrensau langage même, des proportions & des rapports agréables. Le choix & l’assemblage des syllabes longues 8c brèves, donnent à la diction plus de mouvement & de vie ; &, de même, par le choix & le mélange des syllabes affectées par des sons aigus, graves ou moyens, la parole acquérait encore plus de charme & un nouveau moyen d’imitation.’ ' . Quant à l’écriture grecque, il est reçu d’adopter l’opinion que les caraBères orientaux furent apportés en Grèce par Cadmus. Comme les Orientaux écrivent de droite à gauche, on peut présumer que les premiers Grecs écrivoient ainsi. On ne fait à quelle époque ils adoptèrent une autre manière. Mais Pausanias, entre autres exemples- ; parle d’une épitaphe de Cypsele, tyran de Corinthe, qui fut trouvée écrite une ligne de gauche à droite, &. la suivante de droite à gauche, ainsi alternativement ; ce que les Grecs ’ nommèrent loujirophedon. Dans la fuite, on n’écrivit plus que dé gauche à droite. RELIGION. J’entends ici par ce mot tout ce que Ton peut comprendre fous les noms de cosmogonie, théogonie & mythologie des Grecs. Je m’étendrai peu sor chacun de ces articles, & ne ferai presque que rapporter les opinions des favans qui se sont le plus heureusement occupés de ces objets. Quelques mythologistes, dit M. Cousin ( vol.I, p. jj| ), ont soutenu que toutes les fables n’étoient que Técriture sainte mal entendue, & que les dieux, ainsi que les héros du paganisme, nous retraçoient lès patriarches dont i’histoire est conservée dans Tancien testament. II ne faut, pour apprécier cer système, que jetter un coup-d’oeil sur les ouvrages d’après lesquels on prétend Tétablir. Si les rapports que Ton veut trouver entre les dieux de la fable & les personnages de l’hisrôire sainte sont si parfaits, pourquoi tant dé variétés dans les applications ? Chez les nus, Saturne est Noé ; chez les antres, c’est Abraham, fi^S’accorder si mal sur le fond de la même opinion, c’est en éloigner^toute vraisemblance (î). Qui ne sait d’ailleurs que, dans les temps où se sont for-, mées les fables, plusieurs grands" personnages de la nation juive n’existoient pas encore. Séparée de la mer par les Phéniciens & par les Philistins, elle avoit des loix qui la.séparaient encore plus des nations étrangères ; & si, dans la fuite,, le mélange des Juifs avec les antres peuples donna à ceux-ci quelques connoiffances des livres saints, les traits qu’ils en empruntèrent furent une addition aux fables anciennes, bien loin d’en être l’origine. D’autres auteurs ont cru découvrir 1 explication des fables dans les équivoqnes de Tancién langage phénicien ; mais il faudrait prouver, d’abord que toutes les fables sont originaires de Phénicie. Or, cette prétention, dénuée de fondement, est même opposée au témoignage des historiens. Peut-on croire que les premiers Grecs aient attendu les Phéniciens pour se former des dieux ? Qu’à Tarrivée de Ces colonies, les anciens habitans aient adopté quelque chose de leurs coutumes, cela se conçoit ; mais qu’ils aient entièrement abandonné les leurs pour embrasser celles de ces étrangers, à Texclusion même des usages des autres colonies qui abordèrent chez eux, c’est ce qui est contraire à Téxpérience, & mêmé inconcevable. Au surplus, est-on bien assuré de Texactitnde de ces savantes étymologies ? Ne fait-on pas qu’en ce genre les auteurs sont souvent plus redevables à leur imagination qu’à Tanalogie ; & que beaucoup peut-être ont trop compté sur la difficulté de les vérifier ? Les dieux de la Grèce, loin d’être, potir la plupart, originaires de la Phénicie, venoient presque tous de TEgypte. Hérodote s’étoit-assuré du fah> par les recherches les plus.exactes ; mais, comme Tobscrve M. E/éret ( Mém. de tut. T. xxiii), dans son mémoire sur le culte de Bacchus . « Nos » mythologistes n’avoient’ pas la plus légère tein- » ture du cophte ; ils favoient de Thébreu, du » syriaque & de Tarabe ; ils en ont voulu faire » usage ; ils ont voulu dériver de ces langues » tous les noms des divinités adorées dans la n Grèce, ceux mêmes qui étoient purement Grecs, », sans s’embarrasser si les Phéniciens qui navi- » geoient pour leur commerce dans les îles de la » mer Egée, & qui y avoient des comptoirs, ont » fait d’autres étábliffemens dans les terres que » celui de Thèbes, qui étoit peu considérable, » & où le phénicien fut tellement étouffé par la » langue des sauvages Grecs de la Béotie, que (î) Voyei entre autres ouvrages, celui de M. Guérin du Rocher sur les temps fabuleux : quelle prodigalité, ou plutôt, quel abus d’érudition î n Bochart