avoit donné à chacun une égale portion de terre en quarré, à la charge d’en payer, par an, un tribut proportionné : si la portion de quelqu’un étoit diminuée par la rivière, il alloit trouver le Roi, lui exposoit ce qui étoit arrivé dans sa terre ; en même tems le Roi envoyoit sur les lieux & faisoit mesurer l’héritage, afin de savoir de combien il étoit diminué, & de ne faire payer le tribut que selon ce qui étoit resté de terre. Je crois, ajoute Hérodote, que ce fut de-là que la Géométrie prit naissance, & qu’elle passa chez les Grecs. Si, comme le supposent plusieurs chronologistes, Sésostris est le même que le roi Sesac, qui fit la guerre à Roboam, fils de Salomon, la naissance de la Géométrie ne précéderoit, suivant Hérodote, que d’environ mille ans l’ère chrétienne. Cette ancienneté n’est pas suffisante, pour rendre raison des progrès qu’il paroît que l’Astronomie avoit déjà faits avant le tems de Sésostris. Car on n’a pu passer de la stérile contemplation des cieux à un corps de connoissances liées & suivies, que par le moyen de l’Arithmétique & de la Géométrie.
Les plus grands progrès de l’ancienne géométrie sont dûs aux Grecs & aux Mathématiciens de l’école d’Alexandrie. Je confonds toujours ensemble les travaux des uns & des autres. Thalès de Milet montra le premier l’usage de la circonférence du cercle pour la mesure des angles. Il détermina la hauteur des pyramides de l’Égypte, par l’étendue de leur ombre, méthode fondée sur la théorie des lignes proportionnelles ou des triangles semblables. Pythagore est regardé comme l’inventeur de la belle propriété qu’a le quarré de l’hypoténuse, dans le triangle rectangle, d’être égal en surface à la somme des quarrés des deux autres côtés. Quelques auteurs ont écrit que dans l’ivresse de la joie que lui causa cette découverte, il sacrifia cent bœufs aux Muses pour les remercier de l’avoir si bien inspiré ; mais on a de la peine à concilier ce fait avec la fortune bornée du Philosophe, & plus encore avec ses idées religieuses sur la transmigration des ames.
Il seroit difficile de faire une énumération un peu exacte des anciens philosophes grecs qui ont accru le domaine de la Géométrie. Contentons-nous d’observer en général qu’ils ont trouvé presque toutes les propositions qui composent ce qu’on appelle encore aujourd’hui les Elémens de cette science. An av. J. C., 380Elle fit, en deux siècles, de si grands progrès dans la Grèce, qu’au tems de Platon on jetta les fondemens de la théorie des sections coniques.
Platon lui-même est regardé comme le premier qui ait remarqué la formation de ces courbes. Quelques Géomètres de son école, tels que Aristée, Eudoxe, Mnechme & son frère Dinostrate, com-