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lumière de son saint évangile, & dont la loi sera contenue dans un livre absurde, obscur & menteur. Voyez l’hist. ottom. & Moreri. (Ancienne Encyclopédie).

CHI

CHINOIS (philosophie des). (Histoire de la philosophie ancienne & moderne).

Ces peuples qui sont, d’un consentement unanime, supérieurs à toutes les nations de l’Asie, par leur ancienneté, leur esprit, leurs progrès dans les arts, leur politique, leur goût pour la philosophie ; le disputent même dans tous ces points, au jugement de quelques auteurs, aux contrées de l’Europe les plus éclairées.

Si l’on en croit ces auteurs, les Chinois ont eu des sages dès les premiers âges du monde. Ils avoient des cités érudites ; des philosophes leur avoient prescrit des plans sublimes de philosophie morale, dans un tems où la terre n’étoit pas encore bien essuyée des eaux du déluge : témoins Isaac Vossius, Spizelius, & cette multitude innombrable de missionnaires de la compagnie de Jésus, que le desir d’étendre les lumières de notre religion, a fait passer dans ces grandes & riches contrées.

Il est vrai que Budée, Thomasius, Gundling, Heumann, et d’autres écrivains dont les lumières sont de quelque poids, ne nous peignent pas les Chinois en beau ; que les autres missionnaires ne sont pas d’accord sur la grande sagesse de ces peuples, avec les missionnaires de la compagnie de Jésus, & que ces derniers ne les ont pas même regardé tous d’un œil également favorable.

Au milieu de tant de témoignages opposés, il sembleroit que le seul moyen qu’on eût de découvrir la vérité, ce seroit de juger du mérite des Chinois par celui de leurs productions les plus vantées. Nous en avons plusieurs collections ; mais malheureusement on est peu d’accord sur l’authenticité des livres qui composent ces collections : on dispute sur l’exactitude des traductions qu’on en a faites, & l’on ne rencontre que des ténèbres encore fort épaisses, du côté même d’où l’on étoit en droit d’attendre quelques traits de lumière.

La collection publiée à Paris en 1687 par les pères Intourta, Hendrik, Rougemont & Couplet, nous présente d’abord le Ta-hio ou la scientia magna, ouvrage de Confucius, publié par Cemçu, un de ses disciples. Le philosophe Chinois s’y est proposé d’instruire les maîtres de la terre dans l’art de bien gouverner, qu’il renferme dans celui de bien connoître & d’acquérir les qualités nécessaires à un souverain, de se commander à soit-même de savoir former son conseil & sa cour, & d’élever sa famille.

Le second ouvrage de la collection, intitulé : Chum-yum, ou de medio sempiterno ou de mediocritate in rebus omnibus tenenda ; n’a rien de si fort sur cet objet, qu’on ne put aisément renfermer dans quelques maximes de Séneque.

Le troisième est un recueil de dialogues & d’apophthegmes sur les vices, les vertus, les devoirs & la bonne conduite ; il est intitulé : lun-y-u. On trouvera à la fin de cet article, les plus frappans de ces apophthegmes, sur lesquels on pourra apprécier ce troisième ouvrage de Confucius.

Les savans éditeurs avoient promis les écrits de Mencius philosophe Chinois ; François Noël, missionnaire de la même compagnie a satisfait en 1711 à cette promesse, en publiant six livres classiques chinois, entre lesquels on trouve quelques morceaux de Mencius. Nous n’entrerons point dans les différentes contestations que cette collection & la précédente ont excitées entre les érudits. Si quelques faits hasardés par les éditeurs de ces collections, & démontrés faux par de savans Européens, tel, par exemple, que celui des tables astronomiques données pour authentiquement chinoises, & convaincues d’une correction faite sur celle de Ticho, sont capables de jetter des soupçons dans les esprits sans partialité ; les moins impartiaux ne peuvent non plus se cacher que les adversaires de ces pénibles collections ont mis bien de l’humeur et de la passion dans leur critique.

La chronologie chinoise ne peut être incertaine, sans que la première origine de la philosophie chez les Chinois ne le soit aussi. Fo-hi est le fondateur de l’empire de la Chine, & passe pour son premier philosophe. Il régna en l’an 2954 avant la naissance de Jésus-Christ. Le cycle chinois commence l’an 2647 avant la naissance de Jésus-Christ, la huitième année du règne de Hohangli. Hohangli eut pour prédécesseurs Fo-hi & Xi-nang. Celui-ci règna 110, celui-là 140 ; mais, en suivant le systême du P. Petau, la naissance de Jésus-Christ tombe l’an du monde 3889. & le déluge, l’an du monde 1656 ; d’où il s’ensuit que Fo-hi a régné quelques siècles avant le déluge, & qu’il faut ou abandonner la chronologie des livres sacrés, ou celle des Chinois. Je ne crois pas qu’il y ait à choisir, ni pour un chrétien, ni pour un Européen sensé qui, lisant dans l’histoire de Fo-hi, que sa mère en devint enceinte par l’arc-en-ciel, & une infinité de contes de cette force, ne peut guère regarder son règne comme une époque certaine, malgré le témoignage unanime d’une nation.